Personne est parfait
Un Pistolero arrive à son crépuscule et croise l’ange gardien qui va le guider de l’autre côté. Henry Fonda pour faire le lien entre John Ford et Sergio Leone, comme pour opposer le western...
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le 9 mars 2015
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Dans Mon Nom Est Personne, tout est question de regard.
Le regard bleu acier d'une légende, Henry Fonda : altier, plein d'assurance et aiguisé comme un rasoir.
Le regard bleu azur de celui qui a l'air de ne pas y toucher : Terence Hill, charmeur et malicieux, qui est resté jusqu'ici dans un anonymat qui lui permet de vivre de grandes aventures.
Deux regards qui se conjuguent et se complètent, portés sur la Légende : celle de l'Ouest un brin fantasmé, celle d'un pistolero illustre qui a multiplié les exploits, celle d'une horde sauvage qui, quand elle charge, paraît être faite de mille hommes, dans une cavalcade musicale puissante comme la Chevauchée des Walkyries.
Il s'agit du regard porté sur les derniers jours de l'Ouest, ou plutôt, de l'idée magnifiée que l'on s'en fait, en opposition au siècle suivant qui ne respectera plus grand chose. Un passage de témoin oscillant entre les archétypes anciens et sérieux, et la décontraction dans l'attitude et la vision des choses.
Ces regards croisés sont ceux de Sergio Leone, malade de jalousie que ses oeuvres sommes rencontrent moins le succès que ces parodies italiennes qui se sont emparées du genre western. Jack Beauregard incarne ce crépuscule, alors que son habilité au tir demeure intacte. S'inscrire dans l'histoire ? Il y est sans doute déjà. Mais Personne veut y ajouter la manière, en organisant quelque dernier morceau de bravoure. Un baroud d'honneur définitivement plus grand que la mythologie elle-même.
Le tout dans une décontraction quasi totale, accrochée aux yeux lumineux et au sourire matois de Terence Hill, qui opère dans le mélange avec une nostalgie prégnante l'exaltation de ce regard sur un genre qui meurt à petit feu.
Le duo incertain n'en est que plus accrocheur et fascinant, chacun occupant des niches aux antipodes l'une de l'autre. Henry Fonda magnétise littéralement l'écran à chacune de ses apparitions. Son charisme électrise l'attention, tout comme son statut d'anti héros un brin taciturne. Terence Hill n'en est que plus décalé, iconoclaste et charmeur. Véhicule de parodie ne prenant pourtant jamais le dessus sur la magnificence des images western, de leur puissance immédiate d'évocation.
Qui seraient amoindries sans cette incroyable musique de Ennio Morricone, qui, malgré son auto reprise, réussit à inscrire dans l'histoire cette ritournelle sifflée, sautillante et semblant parler d'un sujet tout autre. Tout comme cette cavalcade scandée accompagnant la Horde Sauvage, véritable cri de guerre faisant trembler à la fois notre intériorité et les plus grandes légendes de l'Ouest poussiéreux et inhospitalier.
Mon Nom Est Personne, avec ses paraboles mémorables, son sens du merveilleux qui enlumine les plus grands mythes et son penchant pour l'idéalisme, se vit comme une dernière grande épopée incroyablement sensible et émouvante, s'inscrivant dans la grande Histoire sans pour autant avoir la volonté de tuer le père. Et donc en s'efforçant de respecter un héritage glorieux.
Behind_the_Mask, qui brille aussi fort qu'un miroir de bordel.
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Créée
le 16 nov. 2020
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