C'est pour sa dimension d’œuvre fondatrice d'un genre cinématographique à part entière que j'ai décidé de regarder Mondo Cane tout en ayant à priori que peu d'attirance pour ce genre de production pseudo-documentaire et provocatrice. Le film de 1962 réalisé par le trio Gualtiero Jacopetti, Franco Prosperi et Paolo Cavara connaîtra même les honneurs du festival de Cannes et fera donc naître dans son sillage des tonnes de rejetons et de bâtards créant donc le genre communément appelé Mondo. Les Mondo sont des films qui se pare des vertus du documentaire et de l'anthropologie joyeuse pour montrer à travers de nombreuses séquences prise sur le vif aux quatre coins de la planète les contradictions, les traditions et les étranges coutumes de notre monde de fou. Ces films cultivent souvent et surtout l'art de la provocation et du mauvais goût à travers des séquences parfois totalement bidons dans lesquelles la complaisance est presque toujours de mise.
Mondo cane est donc le tout premier film du genre et le revoir 50 ans après est une expérience bien étrange.
On ne va pas tourner longtemps autour du pot, d'autant plus que dans le cas présent il n'est pas vraiment rempli de confiture, je n'ai pas du tout accroché à cette étrange proposition de cinéma vérité. Il convient sans doute de remettre le film dans son contexte et de saluer l'originalité du concept mais difficile aujourd'hui de trouver des qualités à l'exercice. Je ne sais pas ce qui me semble le plus difficilement supportable entre le voyeurisme crasse et complaisant de la mise en scène ou les commentaires cyniques, suffisant et moqueurs qui plutôt que de contextualiser les images se contentent souvent de juger bêtement les comportements. Mondo Cane c'est un peu l'anthropologie version comptoir. Au fil de ce prodigieux voyage on apprendras donc que les africains sont vraiment des sauvages, les asiatiques des feignasses qui mangent du chien, les français des péquenauds qui gavent des oies pendant que les allemands eux se bourrent la gueule à la bière. Le tout est montré avec la délicatesse d'un pachyderme aveugle comme lorsque le film introduit la séquence sur l'Allemagne aux sons des bruits de bottes (kolossal Finess !!!). Amoureux de la cause animale et végans en puissance ce film n'est pas pour vous puisqu'il prend un malin plaisir à montrer différents sacrifices et mise à mort d'animaux mais toujours bien sûr sous l'angle scientifique de l'anthropologie savante.... Le film glisse même vers le putassier cynique et sordide en montrant l'agonie sur fond de musique western d'une pauvre tortue soit disant désorientée par les radiations et qui se crame au soleil plombant alors que la mer est juste à côté … C'est un peu ça Mondo Cane :« Regardez cette pauvre tortue agonisante sous l'objectif de notre caméra témoin d'un monde cruel alors qu'il nous suffirait de la prendre sous le bras et de faire trois pas pour la refoutre à la mer ».... C'est d'autant plus gratuit et désagréable que certaine séquences semblent totalement bidons comme ses gamins qui nettoient des crânes et des ossements en faisant des bulles de chewing-gum. Les bruitages sont eux aussi parfois assez hilarant comme les « Aïe aïe Aïe « Outch » et compagnie digne d'un cartoon qui accompagnent une course de taureaux au Portugal.
Je ne sais pas au final ce qui me désespèrent le plus de l'humanité entre des teutons bourrés à la bière qui se foutent sur la gueule, des hommes vivants dans des cavernes, des vieux japonais agonisants ou des petits malins qui filment tout ça avec la complaisance du vautour et le cynisme du banquier. En fait si ... Je sais.