Il n’y a pas grand-chose à attendre, a priori, d’un film comme Money Monster. Le canevas bien rôdé autour d’une prise d’otage en direct ne nous épargnera rien, de l’évolution des personnages au profit d’une reconsidération des enjeux, des tensions apparemment intenables de situations en apparence inextricables, alors que l’ensemble est depuis le début cousu de fil blanc quant à sa résolution.
Jodie Foster prend tout de même son sujet au sérieux, et sait ménager une mise en scène assez efficace ; le huis clos initial exploite des situations assez intéressantes, faisant du studio une sorte de chausse trappe aux écrans et coulisses multiples, que ce soit sur le plan spatial ou sonore, grâce à la régie et son récit secondaire. La suite, beaucoup plus improbable, s’attache à faire sortir l’image de la boite dans les deux sens du terme : vers la rue, dans les lieux lourdement symboliques de la Bourse, et en convoquant toutes les images à charge contre le méchant de circonstance, dont l’histoire entière repose sur des éléments beaucoup trop bancals (justifier un crack par un bug, il fallait oser).
Ce qui sauve le film de la banalité la plus affligeante tient finalement à peu de chose : un discours, tout d’abord, dont le cynisme discret infuse l’ambiance générale, et qui fait de la vulgarité de l’émission, de la médiocrité du personnage de Clooney le miroir assez fidèle de la société à laquelle il s’adresse. La façon dont la foule se précipite pour assister au fait divers, les désirs d’explosion de celles-ci, le jeu un brin pervers de la réalisatrice Julia Roberts pour toujours bien cadrer le criminel rappellent régulièrement à quel point le fonds de commerce des jeux romains est toujours en vigueur. En témoigne aussi la versatilité du public qui reprend sa partie de baby-foot une fois le show terminé.
Ce regard acide génère deux scènes fondées sur un twist qui fonctionne particulièrement bien : la première, qui voit le boursicoteur/animateur appeler ses auditeurs à acheter des actions pour sauver sa vie, reprenant le dessus et porté par une mise en scène qui semble en tout point le rendre héroïque, avant un retour de bâton plutôt revigorant. La seconde, dans la sempiternelle venue de la petite amie enceinte du preneur d’otage, et dont l’intervention va déjouer toutes les attentes.
L’intérêt de ces scènes consiste surtout à prendre ses distances avec tous les camps : des élites cyniques qui exploitent le système aux décérébrés qui gobent encore et toujours les martingales qu’on leur fait miroiter.
Malheureusement, ce traitement assez proche d’un Costa Gavras fait long feu dans des développements de l’intrigue où le show et la scénarisation dénoncés prennent justement le pas sur un discours plus ambitieux ou ambigu.
Le film en reste donc plutôt mineur, tout en ayant le mérite d’avoir su exciter à quelques endroit la sensibilité d’un spectateur qui n’apprécie rien tant que de ne pas être traité comme ses innombrables semblables.
(5.5/10)