Le studio Laïka a un gros problème, mais il ne vient pas de leur film. En effet, j'avais beau savoir que ce qu'ils faisaient est bien, avoir appréciés trois de leurs précédents films, lorsque j'ai vu l'affiche au cinéma, j'ai fait "mouaif" et je suis pas allé le voir. (Je pense que le duo Thierry Lhermitte / Eric Judor sur l'affiche ne m'a pas aidé.)
Et tout le monde a du faire comme moi vu que le film s'est (encore) banané : 25 millions de recettes pour 100 millions de production. Aouch !
Au final, on a vu le film un an après, et comme d'hab avec le studio Laïka, on le trouve super-chouette ! C'est une aventure sympathique entre un aventurier anglais Fraust (type Sherlock Holmes) du XIXe siècle, et un Big Foot (le fameux "chainon manquant" (missing link) du titre original) qui parle comme un gentleman. Tous deux décident de partir sur la piste des Yetis, qui seraient les derniers cousins de celui-ci (et au passage, le seul moyen de perpétuer la race.)
Sur ce canevas original, Chris Butler invoque tout un imaginaire tiré du XIXe siècle, lorgnant un peu vers Conan Doyle, sur le Jules Verne du Tour du Monde en 80 jours, un peu sur le western, les mythes d'explorateurs. C'est drole, toujours rythmé, toujours fort à propos (le montage dans ce film est impeccable) et assez intelligent dans ses messages : y a une femme forte qui ne sert pas de love-interest, un Bigfoot maladroit qui est tout sauf imbécile, et même un petit message sur la transidentité.
Monsieur Link choisit au milieu de film qu'on l'appelle Suzanne en mémoire d'une chercheuse d'or sympa. Et lorsqu'on lui dit que c'est un prénom de fille, il fait "ha, aucune importance" et le reste du casting l'appelle Suzanne jusqu'à la fin du film sans que ça soit un drame, ni que ce soit montré comme ridicule. C'est pas exceptionnel, mais quand on voit qu'en face Disney ne fait même pas ça, ça reste chouette.
De plus, le film possède un twist sympa qui a déjoué les prédictions de ma compagne "tu vas voir qu'à la fin, il va ...." et en fait non. Et ça ancre le film dans un message assez clair sur le fait qu'il vaut mieux assumer son originalité plutôt que de chercher à tout prix l'assentiment des autres (d'autant plus quand les autres montrent que visiblement ils ne vont accepteront JAMAIS.) C'est pas révolutionnaire de fou, mais ça fait le café.
Et c'est peut-être la faiblesse du film : il manque un chouïa d'épique ou de choses qui le rendrait vraiment mémorable. Le méchant même s'il est absurde reste assez lambda, la scène de climax finale est fun sans être à couper le squeele. Bon, et y a des blagues maladroites parfois, moi j'ai pouffé devant une blague sur des cookies au caca, mais apparemment ça a gonflé d'autres critiques.
Graphiquement, c'est toujours FOU ! A chaque fois dans le générique, ils nous montrent un passage "making-of" en stop motion montrant l'avancé d'une scène et à chaque fois je m'arrache les cheveux en imaginant le travail que ça doit demander. Tu m'étonne du prix du film.
J'ai vraiment peur qu'ils ferment les portes du studio après le prochain film.
Est-ce que je le montrerais à des enfants ? : Ha ouais, sans problème. C'est le d'ailleurs le premier film Laïka que je recommanderais à des gosses. Autant Paranorman peut faire un peu peur (et je ne parle pas de Coraline) mais ici c'est franchement tout public.
Possibilité de remake/suite : Ou pas. Finalement, un truc cool avec Laïka c'est qu'ils font pas de suite à leurs films.
Le détail qui m'agace : Si on réfléchit à la théorie de la gravité, notamment sur les corps lourds qui pèsent plus que les corps légers, le climax final n'a aucun sens. Mais... bah, c'était fun.
Suis-je le seul ? A me dire que le pauvre assistant qui suit le méchant a "peut-être" survécu à la fin du film. Parce que c'est un peu injuste pour lui là.