J'ai un gros problème d'honnêteté avec ce film. Si je ne m'étais assagi, j'aurais vaillamment fait caca dessus. D'un côté il est évident que c'est dégoulinant comme une Teurgoule, que ça fait passer un road movie Bisounours pour un survival de monstre, que c'est interminable de scènes somnifères qui n'ont aucune importance. Mais d'un autre côté j'avoue, c'est beau.
Ce film, c'est un peu comme un voyage à l'étranger en baroudeur où on se laisse aller hors du temps au fil des moyens de transport colorés, de jolies rencontres et où il arrive toute une panoplie de couilles diverses et variées, du billet qui vaut le triple prévu au passeport volé jusqu'au chemin dévié vers on ne sait où. C'est bateau, on a déjà vu ça mille fois mais il y a une belle authenticité des sensations du voyage grâce à cette zone interdite aussi familière qu'inconnue. Le photo-journaliste ne joue pas si mal, j'ai trouvé (VO exclusivement). La fille à papa est assez typique mais passe bien aussi. Ils ont l'air naturels surtout et la mise en scène précise y fait beaucoup. J'avais peur d'une caméra à l'épaule épileptique. C'est en fait très posé.
Après une heure à galérer et à se dire, c'est moi où il se fout franchement de ma gueule ce film ? Vient la partie finale, celle qui fait que ça passe où ça casse, et là j'avoue, c'est chiant, mais c'est beau. ****spoil**** Le titre du film est clairement un pied de nez au spectateur venu chercher un film de monstre. Les monstres ne sont pas montrés ou presque et ne sont même pas ceux attendus. Arrivés dans la forêt contaminée par des sortes de champignons électriques, les paysans expliquent bien vite qu'il faut davantage craindre les attaques aériennes qui mettent en colère les pieuvres sur pattes que ces dernières. Les véritables monstres sont davantage les deux armées, mexicaines et américaines, à l'extérieur de cette sorte de paradis Jurassic Park coupé du temps et du monde moderne, qui bombardent une zone identifiée "à risque" de plus en plus vaste au moindre signe de présence extraterrestre. Mais ça, on ne le voit pas non plus, c'est un film pacifique. Très souvent, nos deux tourtereaux en devenir pensent simplement au moment où ils vont revenir chez eux avec tous ces petits moments accumulés qui ont fait leur voyage. Lorsqu'ils arrivent enfin à l'énorme mur de la frontière mexicaine construit pour retenir le mal, ils parlent surtout de la vie normale et tranquille qui les attend en rentrant, étrange pensée presque effrayante vue d'où ils sont. La peur des monstres devant cette barrière devrait nourrir leur pensée mais plus grande est leur peur d'une vie gâchée, le doute qui nourrit la condition moderne et la peur de l'humain guerrier et stressé derrière cette barrière, le véritable monstre. Ou bien serait-ce le spectateur en attente de monstruosités ?... Le principal n'est donc pas d'être effrayé par les monstres non plus. Le survival n'est qu'un road movie romantique où deux personnes découvrent un pays et se découvrent. Ces moments vécus dans ce lieu affranchi de la civilisation les ont rapproché et rendu plus humains. Le message délivré lors de la scène finale montre ce que l'on avait deviné depuis le début sans jamais les avoir vu : les extraterrestres ne sont que de paisibles bêtes sauvages persécutées par la mécanique humaine. Eux aussi ont juste besoin d'amour...***spoil****
Donc ouais honnêtement, même avec une justification aussi effarante, ça semble définitivement indéfendable. Et à dire vrai, c'est assez calorique. Pourtant, j'ai trouvé ça assez beau de simplicité et plus solide qu'il n'y paraît.