Un film de Wes Anderson a le même effet sur moi que relire How Green Was my Valley ou l'Enfant du Danube.

Fondamentalement passéiste et nostalgique, je crois que je cherche et je trouve toujours dans ses films quelque chose qui me ramène à ce petit truc de l'enfance que j'avais complètement occulté.

Rapide tour d'horizon :(je n'ai vu ni Rushmore, ni Bottle Rocket)

Quand j'étais petite et que j'étais un membre de la famille Tenenbaum, je n'étais ni surdouée, ni taciturne, mais il y avait ce je ne sais quoi dans la façon de nos parents de nous pousser quoi qu'il advienne vers ce quoi nous semblions être destinés qui me rappelle les méthodes d'éducation artistique d'Etheline et Royal.
Tu seras guitariste de feu de camps ma fille. J'ai abandonné rageusement puis vaguement repris la guitare une fois adulte, et ma mère continue à m'applaudir follement et à m'envoyer avec une ferveur de prophète des petits morceaux "faciles à interpréter." ou au contraire, des liens youtube vers des guitaristes bien plus doués que moi, pour m'inspirer.
Message subliminal : tu ne me décevras jamais, n'essaie même pas. Même si tu fais n'importe quoi et que tu tournes complètement fucked up à l'âge adulte, je t'aimerai toujours-toujours.
Et surtout, personne ne le fera mieux que moi, ce qui est assez effrayant pour un éventuel conjoint.
Maries toi avec maman, ma fille.

Dans la vie aquatique, là, c'était un vieux retour de bâton paternel. Le malheureux Steve Zissou, c'est mon père, baladé depuis des décennies entre les désirs des uns et des autres, naviguant sur tous les océans des autres, sans jamais s'arrêter deux minutes pour se construire un truc à soi. Je crois que je n'ai jamais réussi à le regarder en entier, tant Bill Muray me fait de peine.

Nouvelle baffe familiale dans A bord du Darjelling limited, double combo de la mère qui s'en va loin en décidant que ses enfants sont grands et que ce n'est plus ses oignons (et en ayant entièrement raison, avec une attitude, une bienveillance, et une ténacité irréprochable, big up Angelica !) et de la fratrie conflictuelle.
Owen Wilson en voyage, c'est mon frère qui charge la Megane pour partir au camping de l'IGESA au Grand Crohot et qui tient absolument à ce que je vienne avec.
Une certaine idée de l'enfer, un huit clos épouvantable, sauf que moi, je sais très bien qu'on ne fera pas de cérémonie tribale dans le désert pour sceller notre union fraternelle, mais que comme d'habitude, après avoir épuisé tous les sujets de conversation, on se fera mollement la bise en se demandant comment what the hell on peut partager le même code génétique.

Et donc, Moonrise Kingdom. C'est l'histoire de Julie et d'Alexandre. Julie est trop grande, trop maigre, trop dans la lune. Alexandre est trop petit, trop gros, trop intello, trop bizarre. Ils tombent fous amoureux l'un de l'autre en classe de CM1.
C'est SUPER sérieux l'amour. Tellement sérieux qu'ils n'en parlent à personne, même pas à eux. Le plus important, c'est de le savoir.
A la fin de l'année scolaire, Alex déménage. Julie vomit partout et entame une grève de la faim, sa mère la retire de l'école on lui diagnostique les oreillons, la rougeole, tout sauf un coeur brisé.
Pendant des années entières, jusqu'à la fin de leur adolescence, ils s'écrivent des centaines de lettres et des bandes dessinées sur la seconde guerre mondiale racontée par des fourmis.
Ils n'ont jamais osé fuguer pour se marier à douze ans chez les scouts.
Ils sont devenus trop grands et ils ont rencontré d'autres gens.
Peut être que jamais je ne retrouverai Alexandre. Peut être que c'est mieux comme ça.
Peut être qu'Alexandre a ouvert la porte à toute cette série de garçons incroyables jusqu'à ce que je rencontre celui dont j'ai envie de baiser la main à la sortie de la mairie.

Même si je me prends des putains de claques à chaque fois, je continuerai à aller faire ma psychanalyse dans les films de Wes Anderson.
LioDeBerjeucue
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le 18 mai 2012

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LioDeBerjeucue

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