Au premier abord, Morgan a tous les attributs du film british des sixties, que j'aime tant. C'est un peu foutraque et frapadingue, farfelu, parfois hilarant tout en étant prodigieusement ancré dans la réalité sociale de son époque.
Morgan, très joliment interprété par David Warner, est un jeune homme fantasque qui ne peut se résoudre à prendre acte de son divorce fraichement prononcé, réclamé par madame.
Du coup, le voilà vivant sous deux toits ne lui appartenant pas plus l'un que l'autre: la voiture de Léonie (immobile puisqu'il ne sait pas conduire) et la maison de Léonie, qu'il ne cesse d'investir sous le regard complaisant de cette dernière.
Parce qu'il faut savoir que Morgan est gentiment barré.
Pour autant, sa pathologie n'est jamais traitée avec légèreté ou facilité. Si sa façon de regarder ses semblables sous un biais zoologique amuse, son incapacité à accepter la réalité va le conduire à des conséquences qui finiront par être fâcheuses.
La famille bourgeoise de Léonie et celle communiste de Morgan sont présentées avec justesse, les situations farfelues s'enchainent dans un esprit doux-amer qui nous font faussement penser dans un premier temps que l'ensemble ne laissera pas forcément un souvenir tenace.
Mais assez rapidement, on se ravise. Sans doute que le visage angélique de Vanessa Redgrave (si jeune !) y est pour beaucoup.
L'ensemble se révèle être terriblement attachant.
Faut dire, entre elle la faux-cil et lui le marteau, la séparation ne pouvait pas être complète.