Critique de "Mother"

Résumé

Construire son récit autour d'un fait divers implique le risque d'une focale trop microscopique perdant la vision structurelle des choses. Mais malgré des défauts plus ou moins liés à cet écueil, Mother expose quelques propos intéressants.

Détails (et spoilers)

Loin du film parfait, Mother s'appuie trop sur son fait divers et pas suffisamment sur les sujets parallèles qu'il aborde. Pour autant, ces sujets ne sont pas anecdotiques, mais leurs traitements laissera une grande place aux interprétations subjectives. En effet, la précarité, le handicap, l'exploitation sexuelle, et la parentalité seront autant de sujets qui parsèment le film sans bénéficié d'un traitement profond et minutieux. Ce qui pourra faire dire qu'il se concentre trop sur la résolution du meurtre au détriment des thématiques les plus pertinentes. Pourtant, s'il y a une part de vérité dans ce constat, il est difficile de ne pas faire le lien entre tout ce qui nous est montré et de comprendre de quelle manière ces quatre sujets sont interconnectés.

Certes, Bong Joon-Ho aurait pu aller plus loin, mais le suspense lié au meurtre est selon moi utilisé comme un objet ludique pour montrer aux spectateur·ice·s bien plus qu'une quête pour la vérité. Mieux, le film amène à se poser la question de la culpabilité à plusieurs reprises. Qui est vraiment responsable de la mort de cette jeune fille ? Et est-ce vraiment important de savoir qui lui a asséné ce coup fatal ? La focale mise sur les violences sexuelles auraient mérité mieux il est vrai, mais le film fait bien apparaitre que ce sont les hommes en tant que groupe social qui font du mal à la jeune fille.

Par ailleurs, la place de la mère et le traitement du handicap du fils auraient eux aussi mérité un traitement plus pertinent, mais le comportement de celle-ci s'éclairant à l'aune de son geste passé, ses choix prennent un sens particulier au moment de la révélation et posent des questions intéressantes sur son statut (mère précaire isolée, ayant un enfant handicapé) et sur la notion de culpabilité.

Ainsi, si Bong Joon-Ho aurait dû aller au-delà de la suggestion sur des sujets aussi importants, et qu'il joue parfois un peu trop avec l'irrationnel - les souvenirs qui vont et viennent au gré des massages crâniens, l'acuponcture - il est toujours possible d'y déceler des questionnements utiles. Car au final, les deux personnages peuvent être perçus comme se mentant plus ou moins à eux-mêmes pour mieux survivre face à leur vie tragique, notamment dans le cas de la mère.

7.5/10