Dernier film mexicain de Don Luis, Nazarin est une fable dans la lignée de La Montée au ciel, contant le trajet christique d’un prêtre. Soulignons tout d’abord la performance puissante et inspirée de Francisco Rabal, l’un des grands interprètes de Buñuel. Saluons ensuite la mise en scène du grand d’Espagne, à la hauteur de son génie. Venons-en enfin au fond, typique de son œuvre, qui remet en cause non pas la religion mais tout simplement la croyance. À travers cet homme qui accepte son sort quand il est volé, calomnié, injustement accusé, poursuivi, traqué, injurié, frappé, c’est tout le chemin de croix de Jésus qui est évoqué… Mais ici point de résurrection, point de salut. Le ciel est vide et aucun espoir n’est à attendre. Le message de Buñuel a rarement été aussi noir, sans être désespéré pour autant. Si rien n’est à espérer d’une autre vie hypothétique, il reste la Terre, qui peut être source de joies simples pour peu que l’on prenne le temps de les savourer. C’est ce que nous montrent les images, toujours d’une audace folle et venant parfois s’inscrire en contrepoint opposé au propos apparent… La subtilité de Buñuel est ici éclatante pour donner une œuvre solide, pas tout à fait à la hauteur de ses grands chefs-d’œuvre mais passionnante de bout en bout.