Si j'avais envie d'aller voir ce film c'était dû à son esthétisme : ce dernier est en noir et blanc, ce qui m'a vraiment intéressé tandis qu'en 2014 la 3D est encore et malheureusement convoitée dans les films à l'affiche. Cette esthétique est à couper le souffle, elle offre une galerie d'images importante avec de magnifiques plans sur les décors d'une Amérique touchée par la crise. Ce choix de couleur a sublimé le long métrage, l'imaginer en couleur est impensable et n'offrirait pas ces mêmes paysages respirant autant de vieillesse que le personnage de Wood.
Le scénario est simpliste puisque l'on en imagine la fin dès la lecture du synopsis mais il m'a tout de même envie d'aller le voir avec beaucoup de curiosité. L'histoire d'un homme qui veut apparemment à tout prix aller chercher son (faux?) billet gagnant, quitte à parcourir 1500 km à pieds. -A la lecture du synopsis, j'ai fait un rapprochement, sûrement dérisoire, entre le personnage de Wood et celui de Sara dans Requiem for a dream de Darren Aronofsky. Cette dernière est une personne âgée et veut absolument faire quelque chose de fou (perte de poids pour rentrer dans une robe rouge) afin d'atteindre un but, basé sur un mensonge d'une publicité (elle aurait soi-disant gagné la participation sur un plateau de télé ).-
Dès les premiers plans, la musique de Mark Orton est composé de violons et de guitares, elle apporte un air mélancolique et un rythme langoureux. Ce qui annonce le genre dramatique du film mais également joyeux, qui annonce lui le genre comique. Dès lors, toute la trame narrative est dévoilée : on va avoir affaire à un homme qui marche sur la route en direction d'un but précis. Puis c'est au tour de l'intrigue de se poser, Wood dit à son fils David qu'il a gagné un million d'euros mais ce dernier ne le croit pas, comme tous les autres.
On nous dépeint un vieil homme qui a une vie terne, stoïque et n'a pas de relation fusionnelle avec sa famille. Tout d'abord, sa femme est une personne « catholique » mais qui ne l'est pas tant que cela. Elle a un franc parlé qui manie le vulgaire, le manque de tact et l’égoïsme. Wood est un alcoolique et ce qui permet de le prouver, mis à part le nombre de bières qu'il boit, est le fait que ce film a été tourné essentiellement sur la route et dans des bars. On a finalement donc affaire à un anti-héros mais on s'y attache malgré tout.
Nebraska fait la critique des rapaces familiales et amicales qui ne s'intéressent à vous qu'à partir du moment où vous en avez dans le portefeuille ou que vous avez un peu de notoriété. Je pense qu'il fait également la critique du lien « parents/enfants » : la plupart du temps, une fois que les parents deviennent très âgés, leurs enfants ne s'occupent plus d'eux et ne leurs portent plus d'attention.
On connaît tous dans notre entourage, une personne âgée qui cherche une raison de rester encore en vie malgré l'âge et la solitude, histoire de pimenter sa vie de retraitée. C'est ce qu'on pensait l'entourage proche de Wood, c'est à dire sa femme et ses enfants. Au départ, on croit que c'est une lubie qu'il s'est mis en tête afin d'attirer les regards sur lui.
Mais au final, ce qui change notre regard sur cet égoïsme qu'on a cru percevoir en lui, c'est lorsque l'homme se fait voler par ses neveux son « faux billet gagnant » qu'ils croient tous vrai. Il souhaite laisser à ses enfants une somme d'argent avant de mourir.
Le premier et le dernier plan sont constitués de la même manière, tous les deux se passent sur une route. Sur le premier plan on a vu Wood marcher vers la caméra comme s'il marchait vers son but, et sur le dernier il le quitte, en s'enfuyant au loin en voiture sur un plan fixe.
Ce film à l'allure simpliste est d'une profondeur peu de fois égalée et d'un réalisme fou sur notre société et ses défauts présentés. Je l'ai beaucoup apprécié malgré son manque d'originalité mais des photographies et un jeu d'acteur qui pardonne tout ce qu'on peut lui reprocher.