"No" versus "Lincoln" et "Argo" ? Chili contre USA ?
"No" est un film dont le sujet pourrait rebuter pas mal d'Occidentaux : un mois de préparation d'une campagne électorale au Chili en 1988, pour conforter ou évincer le dictateur Pinochet, qui avait fini par se construire une façade de "respectabilité" après 15 ans au pouvoir.
L'actualité cinématographique de début 2013 aidant, l'intervalle temporel n'est pas sans évoquer celui du "Lincoln" de Steven Spielberg, ainsi que le thriller "Argo". Et contre toute attente, ce "petit" film chilien tient bien la distance, peut être mieux que Lincoln (où les non-passionnés d'histoire américaine pouvaient s'ennuyer), et pas forcément moins bien (dans son genre) qu' "Argo".
Dans "No", le pari est double : esthétique et narratif.
Esthétique d'abord avec une image à gros grain, presque vidéo, qui s'évade parfois en dérives chromatiques, comme les vidéos des 1970/1980s. Du coup, passé le premier étonnement, le spectateur entre vraiment dans le film comme s'il s'agissait de bandes d'actualité.
Narratif ensuite, car il s'agit d'une véritable leçon d'histoire, mais pas du tout dans le style poncif. Au contraire, le scénario se concentre sur un publicitaire qui conseille l'opposition chilienne. Au lieu de ressasser la souffrance et les horreurs de 15 ans de dictature, dans un contexte où une majorité de la population s'est résignée et où une classe moyenne a émergé, il parvient à convaincre les opposants que le seul moyen de gagner le référendum est de proposer un projet de société positif basé sur la joie de vivre.
Ainsi, le film est souvent drôle, mais tout en gardant une dimension humaine forte (notamment à travers les déboires sentimentaux du publicitaire dont l'ex-femme est bien plus militante que lui) et même un vrai suspens.