Un bel essai mais un peu bancal
Le sujet est dur à traiter mais passionnant. Comment on peut contribuer à diminuer la misère du monde? Quelles sont, à notre échelle, les solutions (même minimes) que l'on peut apporter aux gens dans le besoin? Ce sont les questions que se pose Lou, une jeune fille de 13 ans, précoce et solitaire. Elle choisit le destin de No, SDF de 19 ans paumée et loufoque, comme sujet de son exposé.
Le début du film est agaçant. Zabou Breitman nous fait parvenir des chiffres (100.000 SDF à Paris, beaucoup de jeunes, 70% de femmes parmi eux, etc.). Du coup on se sent un peu comme des gamins à qui on donne la leçon et à qui on fait comprendre qu'on est vraiment privilégié. Pour couronner le tout, Lou va dans une école apparemment privée, a un copain riche de 15 ans qui vit tout seul dans un grand appartement Hausmannien, elle vit avec ses parents... ce qui est en totale opposition avec le monde de No, qui n'a pas de toit fixe sur la tête, qui doit quémander pour une cigarette, qui passe sans payer dans le métro, qui a une dent pourrie et qui parle très mal.
Le gros soucis que je soulève dans ce film c'est d'abord ce personnage, la jeune SDF. Mon dieu que le portrait des sans-abris est réducteur. Non ils n'ont pas tous un destin tragique depuis leur enfance, non ils ne sont pas tous alcooliques, non ils ne sont pas tous vulgaires et sales. Et heureusement d'ailleurs. Tout le film tourne autour de cette fille perdue, solitaire comme Lou (c'est bien la seule chose qu'elles ont en commun).
Pour étoffer un peu on a le droit à un destin tragique, celui de la mère de Lou, qui, on l'apprend très vite, est dépressive à la suite du décès de son deuxième enfant à l'âge de 2 mois. Bon, bon. Ça n'apporte pas grand chose à l'histoire. Ça veut peut-être dire que même les gens qui vivent au chaud ont des soucis...? Si c'est le cas on le savait déjà.
Pour finir il y a des choses intéressantes dans la réalisation. Par exemple les scènes sur fond musical, sans dialogue, sont sympa...mais trop courtes voyons! Il n'y en a qu'une seule qui est achevée (la fameuse de Téléphone) quel dommage. Zabou Breitman est dans l'essai, alors elle essaie plein de choses, et c'est trop fouillis! A chaque fois qu'on se dit "Ha tiens, c'est un plan cool ça, ha, ça c'est une musique entraînante!", ça s'arrête. Faute aux monteurs?
Voilà 5 étoiles quand même pour l'audace, car il en faut pour oser filmer ce monde qui reste encore un sujet tabou en France (et aussi pour la jeune actrice, Nina Rodriguez).