En voilà un projet bien intéressant qu’est Nola Circus. Premier film du réalisateur Luc Annest, qui réussit à s’entourer de bonnes personnes pour un projet inhabituel tant sur le fond, la forme et le développement en amont. L’histoire se déroule à la nouvelle Orléans et s’ancre parfaitement dans une ambiance afro-américaine. On y suit deux barbiers rivaux, chacun d’un côté d’une rue. L’un d’eux, notre héros Will, se trouve être en couple avec Nola, dont le frère est particulièrement protecteur, et va, pour protéger l’anonymat de son couple, créer une fausse rumeur qui va progressivement semer la zizanie dans le quartier, mêlant un pizzaiolo, un mafieux, un trafic de drogue et quelques personnalités. Produit par des sportifs, le groupe The Illicit Producers, le long métrage est né d’une véritable aubaine, de rencontres fortuites et de marques de confiance, et permet de mettre en valeur un genre de film très peu vu dans le décor cinématographique français.
Bourré de référence et composé d’un casting soit tout nouveau, soit inconnu chez nous, ce long métrage adapte parfaitement l’humour dynamique et déluré américain à la française. De nombreuses scènes ont vocation à devenir cultes, entre la discussion sur les pénis ou l’étrange fétichisme d’un des deux barbiers, Nola Circus offre quelques fulgurances dignes d’un film des frères Coen ou Guy Ritchie. Si l’on peut ressentir des inspirations chez Spike Lee, on en constate également venant de Chantons sous la pluie, chose moins étonnante lorsqu’on apprend que le film devait à la base être une comédie musicale. C’est d’ailleurs une très grande force de ce long métrage. La puissance de ses inspirations ainsi que la grande efficacité à les incruster dans l’histoire fait qu’on peut autant rire du KKK ici qu’on ne l’a fait dans Django Unchained. Un film dans lequel tant d’aspects (drogue, violence, racisme, vengeance) sont abordés de manière aussi amusante et décontractée. De nombreux sentiments passent au travers des différentes intrigues sans que cela ne soit lourd ou redondant. Une manière de développer des discours sur différents sujets sans recourir à l’ouverture d’esprit du spectateur et sans avoir la sensation de recevoir une leçon.
Par ailleurs, le réalisateur gère très bien les doubles intrigues de chaque personnage. Ceux-ci sont tous liés les uns aux autres par un aspect en particulier et leur donne à chacun une profondeur scénaristique rare. En conséquent, nous sommes face à un véritable film choral où chaque personnage est en quelque sorte le héros. Will est le personnage principal par défaut, le film ne raconte cependant pas son histoire mais celle de ce quartier de la nouvelle Orléans. On a donc une histoire et des personnages non seulement très complets mais qui évoluent également les uns avec les autres. Ils font tous partie intégrante de l’histoire et si l’un d’eux n’existait pas ou était moins présent, cela influerait sur l’intégralité du scénario. Grâce à cela, on ne s’ennuie à aucun moment malgré que le rythme, même très bien maîtrisé, manque parfois de dynamisme. Plusieurs scènes sont folles et les personnages bien écrits mais on regrette que certains, comme Denzel, ne soient pas plus exploités. Malgré une narration assez effrénée, on ressent comme un léger manque de folie.
Finalement Luc Annest réussi à adapter le style de très grands réalisateurs américains en offrant un long métrage complètement hors normes. Par chance, sa production atypique a permis de proposer un film d’un genre très inhabituel qui, espérons-le, bousculera les critères de production et de distribution français. Par ailleurs, il a permis de dévoiler la magnifique Jessica Morali, qui incarne Nola, aux yeux du grand public, une nouvelle actrice française dont on se fera un plaisir de suivre la progression !
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