Comment, par où, par quoi et pour quoi aborder le cinéma des Straub ? Auteurs d'une quantité non négligeable de courts, moyens et longs métrages redéfinissant chacun à leur façon la culture sous toutes ses formes et toutes ses expressions ( littérature, théâtre, musique, peinture, danse, sport, politique, philosophie, méditation...) Danièle Huillet et Jean-Marie Straub réalisent entre 1964 et 1965 Les Non-Réconciliés : un objet filmique délibérément impraticable, assumant littéralement son caractère nébuleux et sa construction narrative particulièrement dense.


Bien qu'il soit quasiment impossible de cerner, résumer voire même comprendre ne serait-ce que le quart dudit métrage en un seul ( et même plusieurs ! ) visionnage(s) l'intérêt pour l'Oeuvre du couple de cinéastes s'avère pour le moins conséquent : structurel et ludique dans le même temps Les Non-Réconciliés nous entraîne dans un poème aride et vertigineux sur l'Allemagne d'après-guerre, laissant s'entrechoquer une pléthore de figures aux fonctions sociales à la fois très caractérisées puis ambigües dans un même mouvement d'exigence cinématographique.


Très ramassé dans sa durée, thématiquement très chargé mais plastiquement superbe ( la photographie Noir et Blanc, d'une beauté encrée, convoque à notre musée imaginaire les films de Robbe-Grillet et ceux d'Alain Resnais ; le film cultive par ailleurs un goût prononcé pour l'usage géométrique des lignes de force et un montage faisant la part belle à d'étranges faux-raccords proches de l'onirisme...) Les Non-Réconciliés fonctionne par analogies et par jeux d'écho, réfutant la limpidité narrative au profit de l'abstraction poétique...


On se promène de personnage en personnage et de place en place comme au coeur d'un gigantesque terrain de jeux, Huillet et Straub révélant leur intérêt pour la libre-association et leur pari pour l'intelligence du spectateur. Le film joue dans le même temps sur une vue de détail et sur une vision d'ensemble de sa constitution, peuplé d'images concrètes et surréelles tout à la fois. C'est beau, étonnant et médusant.

stebbins
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le 6 nov. 2019

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