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Si As Tears Go By démontrait d’une recherche de sens pour Wong Kar-Wai, Nos Années Sauvages, deuxième long du cinéaste, entérine déjà le style du Hong-Kongais et livre les prémices du reste de sa carrière. Car déjà ici, l’épure des dispositifs techniques et narratifs est manifeste, concentrant toute l’attention du réalisateur sur une esthétique, une atmosphère, une mélancolie.
Nos Années Sauvages est une histoire du temps : celui qui s’accélère et ralentit au rythme de l’émotion, celui qui efface les instants éphémères d’une vie autant qu’il en marque les éternels, celui qui signifie les rencontres et creuse les séparations. C’est le temps, toujours compté, qui motive les personnages dans leur errance générationnelle.
L’oiseau sans pattes qui ne peut pas se poser, dans une course perpétuelle contre la sclérose d’une vie monotone, toute tracée par le conglomérat des destinées de la mégalopole. Une course qui ne peut qu’aboutir à l’épuisement, alors même que c’est la chronologie qui est remontée pour arriver aux origines. Le temps lui est compté.
La figure maternelle achète ses relations, entre un fils issu du marché noir philippin et un compagnon gigolo. Des liens fragiles, pour pallier la solitude de cette ville surpeuplée, que le temps va irrémédiablement rompre. Le temps lui est compté.
Des relations vouées à l’échec, alors que les rapports amoureux sont inégaux, l’homme refusant de s’attacher. Les moments heureux sont vite balayés pour laisser place à la détestation de l’impossible. Le compte à rebours est enclenché dès l’initiation de la romance, le temps leur est compté.
Un policier aux ambitions marines frustrées par l’attente d’un changement, d’une variation dans cette rythmique plate qui l’oblige à battre le pavé, errant dans un blues pluvieux. Lui, compte les heures.
Et le spectateur, dans tout ça, regarde ces personnages glisser sur la frise, alors que les couleurs viennent sublimer le spleen, que les rares moments de joie se font dans l’intimité d’un plan rapproché, que le cadre vient les isoler le reste du temps.
Nos Années Sauvages ne se raconte pas mais se vit, comme suspendu dans le moment, appelant au sens dans le sensoriel.