Trois destins

Ce film à sketches réalisé par Duvivier s'inscrit dans une continuité évidente avec un autre de ses films américains, composé de plusieurs séquences presque indépendantes : "Six destins" (Tales of Manhattan) sorti l'année précédente en 1942. C'est un exercice de style et il faut accepter le cadre posé au forceps, ici en l'occurrence deux hommes qui échangent au sujet d'un rêve qui obsède l'un deux, donnant lieu à trois histoires occupant l'intégralité du film exceptées 5 minutes d'introduction et de conclusion. C'est une insertion artificielle, mais pour peu qu'on adhère au contenu des trois histoires emplies d'un voile fantastique romantique, le voyage peut se faire avec une certaine candeur agréable.

Le premier récit est sans doute celui qui s'apparente le plus à un conte, avec une jeune femme se trouvant laide amenée à subir une transformation physique à l'issue d'un bal masqué, après avoir découvert un mystérieux personnage et porté un masque enchanteur. Un soupçon de Cendrillon, dans lequel l'horloge sonnant minuit et la fin de Mardi Gras débouche sur une conclusion très différente.

Le second est plus convenu et moins enchanteur, avec Edward G. Robinson victime de la fatalité et de la sorte de malédiction qui frappe ceux qui ont voulu connaître leur destin pourtant funeste. On lui prédit qu'il va commettre une atrocité, et dans un magma de prophétie autoréalisatrice, bien évidemment, il la commet. Pas ouf.

Et l'enchaînement avec le troisième se fait sans repasser par la diégèse originale du film, avec sans transition la présentation d'un acrobate malmené par un rêve où il se voit mourir. C'était sans doute le plus prometteur, avec Charles Boyer et Barbara Stanwyck, mais on ne peut pas dire que l'atmosphère soit envoûtante, il manque quelque chose de plus puissant en termes d'emprise fantastique.