"Sekai no Okiku" jouit d'une ambiance d'ère Edo très travaillée, orné de sa photo noir et blanc pour figurer cette époque de l'histoire du Japon, en hommage aux jidai-geki d'époque. Un scénario épuré à l'extrême pour mettre en scène un récit féodal, d'un côté la jeune femme éponyme Okiku, fille d'un samouraï à l'avenir menacé, et de l'autre deux hommes dont l'occupation (professionnelle) principale constitue un peu le centre d'attraction du film : ce sont des hommes à fumier, des gens qui collectent les déjections des villageois pour les transformer en engrais à revendre aux agriculteurs du coin. Chacun de ces personnages aura des épreuves très différentes à surmonter, et une romance incongrue se dessine indubitablement à l'horizon.


La métaphore est assez claire : l'enjeu pour ces trois-là réside dans leur capacité à se sortir de la merde, de manière plus ou moins imagée. Dans la tradition d'un certain cinéma japonais Junji Sakamoto joue beaucoup sur le côté bouffon des événements, autant du côté de cette romance improbable dans un tel univers (on voit des selles à n'en plus finir) que dans les péripéties scatophiles engendrées par cette thématique (on pense notamment à une fameuse scène d'inondation d'un village, comme une montée des eaux gorgées d'excréments et de relents abominables). Il y a sans doute une intention particulière dans cette façon d'aborder les selles, mais je dois avouer qu'au bout d'un moment on se lasse de cette façon de filmer des gens qui discutent tout en déféquant tranquillement...


Le fond de l'air est garni d'injustices sociales, la dureté des conditions de vie des protagonistes étant suffisamment explicite. Le film aurait gagné à mon sens à se faire un peu moins grossier dans la bouffonnerie (notamment quelques passages ponctuels à la couleur très dispensables dès lors qu'ils ne servent qu'à enjoliver de la matière fécale, la bande sonore n'étant en outre pas avare en bruitages dégueulasses), mais il reste singulier dans sa tonalité étrangement positive et pleine d'espoir au regard de la fange et des immondices omniprésentes.

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le 28 juil. 2024

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Morrinson

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