La belle et les bêtes
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On ne s'ennuie pas, et on passe même un presque agréable moment, durant les presque 2 heures que dure Okja, et c'est déjà un très bon point à mettre au crédit de Bong Joon-Ho. Son nouveau film ne manque en effet pas de rythme et de rebondissements. Les acteurs sont, de façon générale, tout à fait convaincants. Tilda Swinton, qui endosse à nouveau le costume des jumelles diaboliques après Ave Cesar, et Jake Gyllenhaal animateur complètement psychotique, donnent du leur, - vraisemblablement avec plaisir - ! L'univers visuel, chatoyant et bucolique dans les montages chères à Mija et Okja, glauque et froid du côté de la firme américaine et de ses abattoirs, est chiadé. L'humour est aussi là et fait souvent mouche. D'autre part, on ne peut, en tant que végane convaincue, que saluer le message porté ici par le réalisateur : oui l'industrie de la viande c'est des sévices infligés aux animaux élevés en masse uniquement pour le plaisir des papilles, c'est des mises à mort violentes, c'est des accouplements/inséminations forcés, c'est des bêtes entassées les unes sur les autres, c'est tout pour le capitalisme et rien pour l'éthique. Et si le passage par l'apologue (le fameux placere et docere !) peut permettre d'ouvrir les yeux de ceux qui n'auraient pas encore enlevé leurs oeillères on ne peut que s'en féliciter.
Toutefois, malgré tout cela, on reste un peu sur notre faim, surtout face à l'engouement de certains, et l'on ne peut qu'émettre quelques réserves après les 2 heures de film... Le scénario est en effet sans aucune innovation : situation initiale, élément perturbateur, péripéties, happy end, tout est là. On ne s'ennuie pas, oui, mais on n'est pas surpris non plus. Le film, qui se veut à la fois héritier du dessin animé à la Miyazaki, du film d'action à l'américaine voire du documentaire qui dénonce, ne tranche pas entre ces trois orientations, et reste donc un peu tiède sur ces trois tableaux. Du premier on retrouve l'histoire touchante de l'amitié enfant-animal, avec la candeur et la fougue de l'enfance, ainsi que l'exubérance burlesque des "méchants", mais l'émotion peine parfois à poindre. Du deuxième on a les scènes de course-poursuite et les faux suspens... Du troisième enfin, l'aspect moralisateur du film, avec sa dénonciation pas toujours fine de l'industrie inhumaine de la viande et la mise en lumière de l'action des militants du Front de Libération Animale (qui font grandement écho à celle de L214 dont on entend régulièrement parler dans nos contrées). Si le réalisateur cherche, on le sent, à éviter le manichéisme (les militants ne sont pas si angéliques que ça, et la PDG de la firme américaine a un père peu sympathique alors la pauvre enfance malheureuse tout ça tout ça) les ficelles sont un peu grosses. La durée du film, finalement trop courte pour fouiller le thème qu'il embrasse, ne permet par de construire des personnages extrêmement profonds et de dépasser le scénario simpliste et attendu. Résultat, le film manque parfois d'épaisseur et d'intensité.
Okja a donc le mérite de porter un message noble, et de le faire relativement efficacement grâce au passage par la fable et son argumentation indirecte... S'il peut rencontrer un large public (reste ici le problème netflix...) et appuyer l'action des militants de l'éthique animale ce sera déjà un énorme aspect positif et on remerciera alors Bong Joon-Ho pour cela, malgré les limites de son nouveau film.
Créée
le 30 juin 2017
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7 j'aime
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