La belle et les bêtes
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Quatre ans après Snowpiercer, le réalisateur coréen Bong Joon-ho revient avec Okja, mais n’offre cette fois qu’un film mineur trop américanisé.
Le nouveau film de Bong Joon-ho, Okja, marqué par la polémique autour de Netflix – dû à leur refus de sortir le film en salles -, était attendu au tournant à Cannes. Pourtant prometteur durant une longue première partie, où se dévoile une relation d’amitié forte entre la jeune Mija, et son “super-cochon” Okja, dont elle s’est occupée durant des années, le film se mue par la suite en un projet écolo des plus maladroit. Mais surtout, à l’inverse par exemple de Snowpiercer (2013), ou même de Park Chan-wook avec Stoker, la part de la production américaine semble ici prendre le part sur l’approche cinématographique de l’auteur sud-coréen. Qu’importe la liberté qu’il déclare avoir eu de la part de Netflix, le résultat final, apparaît bien moins fin et subtil que ce que nous livre d’habitude ce petit pays d’Asie.
Assez vite, le film prend un ton enfantin, autant dans la relation entre Mija et Okja (à base de gros câlins et de jeux dans la forêt), que dans ses messages amenés à la truelle. Un discours écolo qui tend à dénoncer les méthodes inhumaines dans les abattoirs, amené avec tellement peu de finesse qu’il semble ne s’adresser qu’aux convertis au végétarisme. Dès lors, l’aspect merveilleux, qui aurait dû convoquer autant Spielberg que Miyazaki, s’estompe. Le problème résidant davantage dans la forme que dans le fond, puisque s’y retrouvent des thématiques communes à The Host, chef d’oeuvre du réalisateur. Dans ce dernier, l’impact de déchets toxiques sur la nature amenait à la création d’un monstre. La force du film venait alors de sa portée humaine, avec la reconstruction d’une famille, dans le tragique et la terreur. Dans Okja, Bong Joon-ho tente de retrouver justement cette touche d’émotion avec les sentiments de Mija, prête à tout pour sauver son unique ami. Malheureusement, cette fameuse émotion, étrangement difficile à ressentir entre un humain et son animal, se voit trop souvent reléguée derrière des gags bateaux (deux affligeantes scènes autour du caca d’Okja) et le pseudo discours politique prôné par un groupe de militants, contre l’enfermement des animaux.
Bien sûr, Okja sait se montrer efficace comme divertissement comique. Mais de la part d’un tel cinéaste, il est particulièrement dommage de le voir incapable de proposer de réels moments de cinéma. Quelques scènes d’action insignifiantes – éventuellement une poursuite efficace dans un super marché, mais vite expédiée -, et une tendance à se reposer sur les acteurs plutôt que sur l’image (cadre, photographie, mouvements…). Principalement Tilda Swinton, plus que convaincante dans ce rôle de PDG mal dans sa peau et tristement pathétique, et Jake Gyllenhaal, à la longue bien trop surexcité, sans oublier bien sûr Ahn Seo-hyun , sympathique. D’Okja, notamment avec son final sans originalité, il ressort alors le sentiment d’une oeuvre en partie impersonnelle car fortement américanisée, dans le sens hollywoodien du terme – scénario standard avec des rebondissements prévisibles et une forme lisse sans véritable créativité. Relativement formaté et peu surprenant, le film aura provoqué bien du bruit pour pas grand chose, car s’avère oubliable aussitôt les lumières de la salle rallumées – ou lorsque s’éteindront les écrans de télévision.
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Créée
le 29 mai 2017
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