On-Gaku : Notre rock ! est un petite merveille du cinéma d'animation japonais, sans doute pas un très grand film mais une petite douceur comme celles que l'on prend plaisir à laisser doucement fondre sur la langue. Le film de Kenji Iwaisawa a été réalisé de la manière la plus artisanale et indépendante qui soit, résultat des courses sept ans de travail avec des phases durant lesquels faute de moyens le réalisateur travaillera carrément tout seul chez lui réalisant à la main et avec une maniaque précision l'un des 40 000 dessins nécessaire au film. Après une campagne de crowdfunding destiné à financer la fin de la création du film, On Gaku Notre Rock sortira finalement et recevra un accueil chaleureux dans tous les festivals dans lesquels il sera présenté (Annecy - Toronto).
On Gaku : Notre Rock ! est presque aussi minimaliste dans ce qu'il raconte que dans son épure graphique. Le film de Kenji Iwaisawa nous invite à suivre la trajectoire de trois jeunes délinquants qui sans rien connaître à la musique décident de fonder un groupe de rock . Leur musique primitive, répétitive, binaire et simpliste leur assure pourtant une participation à un petit festival de musique.
Graphiquement le film est d'une désarmante simplicité choisissant l'épure plutôt que le réalisme et la richesse des détails et texture. On se retrouve donc avec des personnages en 2D fait de grands aplats de couleur avec le contour et les traits et du visage dessinés au feutre en noir . Un aspect très bande dessinée minimaliste renforcé encore par le manque d'expression des visages totalement figés et souvent mono expressif. Même si ils ne sont pas d'une grande richesse visuelle et gorgés de détails les décors souvent faits de couleurs pastels sont un peu plus foisonnant. Quant à l'animation elle est à la fois fluide et rigide, naturelle dans les mouvements et stylisée dans es postures peut être à cause du procédé créatif de rotoscopie qui consiste à filmer en live les acteurs et les mouvements de caméra pour redessiner ensuite leurs contours et mouvements dans un processus d'animation. La mise en scène et la dynamique du film est ainsi très antinomique , à la fois rigide dans l'expression et le graphisme du film tout en étant parfaitement fluide. Si graphiquement le film est donc assez austère il n'empêche que lors de quelques séquences, surtout musicales, le réalisateur lâche un peu la bride nous offrant des scènes plus riches en textures, en choix graphiques comme lors d'une envolée de guitare acoustique solo accompagné d'un effet crayon de papier proche de célèbre clip Take on Me de A-Ha. L'apogée du procédé restera le concert final durant lequel le film devient graphiquement aussi riche que les envolées harmoniques du groupe nous assénant un trip de rock progressif assez fascinant.
Quant à son histoire On-Gaku : Notre rock ! fait aussi dans une forme de minimalisme qui lui sied plutôt bien. Crâne chauve, visage ovale et fine moustache le personnage principal aux allures de professeur Choron est un impassible introverti qui trouvera dans l'énergie de la musique une occasion de briser sa carapace. Pour le reste le film suit de manière scrupuleuse et décalé les ressorts de ce type d'histoire avec formation du groupe, répétition, séparation, concert final sauf que dans le cas de On-Gaku : Notre rock ! il n-y a quasiment aucune progression puisque le groupe joue quasiment le même morceau ultra-répétitif et monocorde du début à la fin du film. Il faudra donc attendre le concert final pour que le groupe se libère complétement en transforme l'énergie brut en un trip harmonieux et planant. Kenji Iwaisawa utilise à merveille l'austérité de son personnage principal pour en faire une sorte de Kitano pince sans rire et lorsque ce dernier s'échappe en courant d'une horde de punks à crêtes tout en jouant de la flûte à bec cela donne un moment de folie douce assez hilarant. Le film est également truffé de référence visuels aux pochettes des Beatles, Led Zeppelin, King Crimson, Mike Oldfiled ou Pink Floyd et musicalement il nous offre quelques très bons moments de pop acoustique ou d'envolées proche du rock psychédélique.
Outre le respect qu'impose l'intégrité et la démarche artistique de Kenji Iwaisawa, On-Gaku : Notre rock ! est un chouette petit film d'animation à la fois drôle et expérimental et même si l'impassibilité des caractères empêche une pleine identification et une vraie émotion, ce voyage musical minimaliste et barré mérite largement d'être vécu.