Vies antérieures, vies parallèles, beauté onirique
"Oncle Boonmee", d'une lenteur et d'une beauté qui laissèrent de marbre bon nombre de spectateurs, n'est pas de ce genre de films qui sont contemplatifs juste pour être contemplatifs. On sent dans cette oeuvre une authenticité évidente, une sincérité qui touche. Il a également le mérite de nous confronter de près à cette culture et ces croyances que nous ne côtoyons pas si souvent...mais le fait avec une poésie certaine. "Oncle Boonmee" fait confiance aux spectateurs. Pourtant, il ennuie parfois, traîne un peu la patte par moments avec des scènes pas forcément utiles. Mais il regorge aussi de superbes curiosités. Ces fantômes terrifiants aux yeux rouges. Ces paysages habités par une force spirituelle brillamment retranscrite par le réalisateur. Et puis, plus belle scène du film, cette princesse, dont le corps fut habité dans une autre vie par Oncle Boonmee, qui s'offre aux eaux et se laisse pénétrer par ce poisson-chat qui la connait, qui devine son tourment, à qui elle demande de la rendre aussi belle que son reflet trompeur, avant de s'abandonner à un orgasme tourbillonnant.
Après avoir exploré cette grotte inquiétante, Oncle Boonmee peut désormais mourir en paix.
Les quelques dernières minutes du film viennent un peu briser cette beauté cosmique et nous laissent un peu sceptiques. Mais cette fin n'en est pas moins surprenante. Outre les croyances en ces vies antérieures, Apichatpong Weerasethakul suggère un possible décuplement de la personne; un bouleversement de l'espace temps, une fusion entre le passé et le présent, et finalement l'existence de vies multiples et parallèles.
Une palme d'or discutable, peut-être, mais Oncle Boonmee est absolument unique en son genre, et incarne à lui seul le terme d' "OVNI cinématographique".