A un poil de cul d’être bon

Pour être honnête avec vous, j’ai pris ce film uniquement parce que, de un, le titre m’a inspiré, allez savoir pourquoi, et de deux, il y a plusieurs acteurs dans le casting que j’aime bien, dont Frank Grillo (Boss Level, Descente au Poste). Mais je ne savais ni qui l’avait réalisé, ni de quoi ça parlait, et donc j’y suis allé à l’aveuglette, un peu comme à la belle époque des vidéoclubs où on louait des films à la jaquette. Après quelques recherches, il s’avère que le réalisateur John Swab œuvre depuis plusieurs années dans le cinéma indépendant, et en l’espace de 2 ans, il a fait 4 films avec Frank Grillo, omniprésent depuis quelques temps dans le domaine de la série B (bien qu’il ne tienne pas à chaque fois le premier rôle) : Body Brokers et Ida Red en 2021, Little Dixie et ce One Day As A Lion en 2023, et bientôt un de plus puisqu’ils ont fait ensemble Land of Grace qui sortira en 2024. C’est la première fois que Swab réalisé le scénario de quelqu’un d’autre, ici écrit par Scott Caan (la série Hawaii 5-0, la saga Ocean’s Eleven) qui interprète également le rôle principal du film. Le résultat est… moyen, et c’est dommage car bien qu’on ne se soit pas ennuyé, on sort de One Day As a Lion avec cette impression de gâchis.

One Day As A Lion fait parfois penser au cinéma des frères Coen ou à celui de Quentin Tarantino, pour sa variété de personnages et d’intrigues. Mais au final, il se rapprocherait bien plus d’un Dangereuse Sous Tous Rapports (1986) de Jonathan Demme ou d’un Une Vie Moins Ordinaire (1997) de Danny Boyle, avec son mélange d’action/thriller, de comédie, et de romance. Nous sommes ici dans un film de gangsters assez léger et décalé dans le sens où on va avoir affaire à des bras cassés, ou plutôt à un bras cassé, le héros du film, à qui il n’arrive que des couilles (son otage s’enfuit, pendant qu’il va la chercher, il se fait voler sa voiture, …). Vous savez, ce genre de gentil gangster à qui rien ne sourit, pas même la chance, et qui en plus ne sait pas saisir les opportunités lorsqu’elles se présentent. Oui, clairement, le rôle de Scott Caan ressemble à celui de Ewan McGregor dans Une Vie Moins Ordinaire. Il est tellement gauche qu’on se surprend parfois à l’encourager intérieurement. Les personnages sont très attachants, parfois improbables (l’avocat qui ne parle de lui qu’à la 3ème personne façon Alain Delon) et sont une des forces du film. On sent un grand respect du réalisateur pour eux et son film se construit autour d’eux. Dommage qu’ils ne soient pas suffisamment approfondis car, oui, on aurait aimé les connaitre bien plus. Il aurait peut-être fallu que le film dure un peu plus longtemps que 1h27. Ils sont intéressants, mais pas bien exploités. Même chose au niveau du casting qui est excellent, avec chaque acteur(trice) qui livre une très bonne prestation et qui croit à son personnage. Mais on regrettera que certains, comme Frank Grillo et J. K. Simmons (Spiderman, Whiplash), ne soient pas plus présent à l’écran et que, à l’exception d’une ou deux scènes, ne se mêlent que peu à l’intrigue principale, se contentant d’œuvrer dans leur arc narratif en parallèle. Mais Scott Caan est très bon dans le rôle de l’imbécile qui cherche à bien faire, même si Marianne Rendon (les séries Imposters et In The Dark) lui vole la vedette à chacune de ses scènes.

Ce qu’on perd en profondeur de personnages, on le gagne en rythme et les péripéties s’enchainent quasi sans temps mort. Certaines scènes sont par moment improbables, dans le sens où cela ne pourrait jamais se produire ainsi dans la vraie vie (la scène du tribunal) et cela pourrait paraitre ridicule pour certains. Mais pour d’autres, ceux qui se laisseront porter sans trop se poser de questions, cela amènera de la fraicheur et un peu de comédie car les quelques touches d’humour sont bienvenues. Bien qu’elles ne fassent jamais rire aux éclats, ces scènes amènent un peu de légèreté, accentuant le côté tragicomique de certaines situations. Parfois, on ne sait pas si on doit rire de ces situations ou les prendre au sérieux car One Day As A Lion va souvent jouer avec cette limite. Dommage que les sous intrigues qui se mêlent les unes aux autres n’aient que peu d’influence les unes sur les autres. L’ensemble est malgré tout assez faible et le film reste trop sage, ne s’engouffrant jamais dans des directions qui auraient pu le rendre un peu plus punchy, qui auraient pu amener un peu de piquant. On aurait par exemple aimé un regain d’activité criminelle de la part de notre duo principal. On aurait aimé une tentative d’évasion de prison plutôt que le tribunal. Mais il n’en sera rien. Et si certaines scènes tombent un peu à plat, c’est en partie à cause des dialogues qui parfois sonnent un peu faux, trop stéréotypés, trop forcés pour leur donner un air cool. Quant à la mise en scène, bien qu’elle soit plutôt carrée, propre, avec une photographie soignée virant souvent vers le jaune, elle reste malgré tout trop sage, un peu trop scolaire, avec quasiment que des plans fixes là où il aurait peut-être fallu par moment donner un peu de dynamisme, un peu de folie.

One Day As A Lion avait toutes les cartes en mains pour proposer un film de gangsters léger mais réussi, mais il se prend les pieds dans le tapis à plusieurs niveaux. Bien qu’il reste regardable sans souci, on en ressort avec cette impression de gâchis.

Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-one-day-as-a-lion-de-john-swab-2023/