Ça pique les yeux dans tous les sens.
Esthétiquement même si il y a quelques compositions qui se tiennent cette saturation des couleurs en devient presque criarde.
Cinématographiquement, beaucoup de ralentis, zoom lent et autres effets qui tendent vers une mystique presque chamanique.
Le film contient une certaine violence.
Dans Il Etait une Fois à Hollywood de Tarantino (2019) la violence est salvatrice, on pourrait presque la désirer. Ou encore dans La Grande Anthropologie Bleue de Yves Klein (1960) les traces de la violences deviennent beauté à l'état pur. Ce sont des exemples réussis de violence sublimées.
Mais dans Only God Forgives, le diable vient punir l'homme; en silence. C'est presque gratuit. Il a une tête de nounours ! On a trop envie de lui pincer les joues. Le film tend vers la morbidité à certains moment et c'est parfois beau, parfois dégoûtant.
On a donc deux antagonistes mutiques.
Je trouve que comme dans Drive (2011) c'est un peu facile. On a perdu le langage et seul une violence morbide subsiste, seul moyen de communication de l'homme sauvage. La masculinité toxique a déjà été traité dans des films comme Taxi Driver (1976), tout comme la dégradation du langage dans Alphaville (1965). Only God Forgives va peut-être plus loin en atteignant le dégoût de l'homme moderne.
Une bande son asiatique-electro très fatigante ... Le film en devient presque gênant par moment. Mais on revient toujours peut-être un peu vers cette saturation qui vient nous percer les tympans dans une sensation de malaise.
Et le film réussi a nous donner cette sensation de malaise de deux éléments contradictoires qui s'opposent.
En fait, je trouve qu'il y a du bon mais j'ai toujours cette impression de facilité de la part de l'auteur sur tous les points que j'ai pu évoquer.
Je suis vraiment partagé entre grotesque ou oeuvre peut être trop 21ème siècle.
Et pour conclure je vous laisse avec cet extrait d'interview de l'auteur par Télérama :
Dans notre premier appartement, notre plus jeune fille, qui avait
alors deux ans, s'est mise à crier toutes les nuits. Elle hurlait «
Non ! » et montrait le mur, plusieurs fois au cours d'une même nuit.
Nous avions déjà remarqué qu'elle possédait une sorte de don, une
capacité à entrer en relation avec un monde d'esprits. C'est quelque
chose qui, en Europe, nous ferait passer pour des dingues, alors on en
parlait avec personne. Mais à Bangkok, ma femme a décidé qu'il fallait
faire quelque chose et j'ai parlé avec mon directeur de production. Il
est Thaï et a tout de suite compris. Il est venu avec un shaman, qui a
confirmé qu'il y avait un fantôme dans la chambre, qu'il voulait
entrer en communication avec notre fille et qu'elle refusait, c'est
pourquoi elle criait « Non ! ». On a alors quitté l'appartement et
tout est redevenu normal. C'est à ce moment-là que j'ai décidé
d'éliminer toute logique du scénario. Il ne s'agit pas de comprendre,
il s'agit de croire. Il ne s'agit pas de logique, mais d'émotions.
Le film se veut donc volontairement abstrait mais incapable d'engendrer quelque chose de complexe ou de vraiment esthétique. Par exemple je n'aime pas Pollock mais je suis capable d'y trouver quelque chose de beau. Mais là c'est difficile. Je n'aime vraiment pas la photographie (dans son éclairage comme dans sa composition) du film et c'est ce qui m'a déplu dès les premières minutes du film.
Pour ce qui est de la direction artistique, j'ai donc du mal à apprécier cette esthétique du dégoût, qui oscille entre malaise et nausée. Dans l'horreur (comme Salo par exemple) on peut trouver des plans qui sont absolument magnifique. Mais encore une fois j'ai vraiment du mal à appréhender cette esthétique.
Le film pouvait toujours se rattraper même 10 minutes avant la fin mais ne l'a pas fait.