Ce qu'aurait pu être Drive si Kavinsky s'était abstenu.

La dorure de la précédente réalisation de Nicolas Winding Refn ne peut décemment être justifiée que par la présence du DJ dans la bande originale du film et le nombre de hipsters s'étant rués dans les salles obscures comme pour y pratiquer un before.
Only God Forgives semble être (on l'aura deviné) une oeuvre expiatoire.
En effet, comme pour se faire pardonner du son creux qu'émettait sa version anticipée et édulcorée, Winding Refn nous offre ici du Tarantino régurgité et ravalé cinq fois, avec la violence et le sang qui manquaient à un Wong Kar-Wai trop puritain. Les quelques filtres bleus et jaunes ajoutés avec une parcimonie et une timidité déconcertantes sur la pellicule de Drive se voient ici quasi sacralisés maîtres de la lumière (ce qui n'est donc pas sans rappeler un certain Pierrot de Godard, même si les couleurs y ont une tout autre utilité). Un choix visiblement justifié, dans la mesure où les quelques rares scènes éclairées par le soleil nous ramènent à une réalité que nous avions oubliée, projetant alors le reste de l'histoire dans une espèce de quatrième dimension, après réflexion, quelque peu surréaliste.
La photographie n'est en rien différente de celle que l'on trouve dans Drive, si ce n'est que certains plans parviennent à combler un manque de poésie qui aurait pu devenir pesant par absence de contraste. Quant aux manipulations dolanesques des ralentis et autres plans en profil des personnages en train de marcher, elles fonctionnent convenablement, non sans un sentiment d'amertume conjugué à une impression de facilité.
Les personnages sont intéressants mais se fatiguent vite. On en fait le tour assez rapidement et ce n'est pas plus mal, car ils n'ont rien de plus à exploiter que leur simplicité morale et l'art de manier le sabre (et je ne parle pas de l'extraordinaire capacité du Gosling à ne savoir jouer qu'une seule expression faciale).
On sent malgré tout que c'est un film maîtrisé, avec un scénario qui tient la route et qui, contre toute attente, possède une fin (chose qui tend à disparaître de nos jours).

PS : On remercie également Cliff Martinez pour cette bande son ostentatoire, parfois cacophonique, sans quoi ce film aurait été d'un reposant ennui auditif.
aigre_doux
6
Écrit par

Créée

le 30 mai 2013

Critique lue 685 fois

1 commentaire

Dɑm

Écrit par

Critique lue 685 fois

1

D'autres avis sur Only God Forgives

Only God Forgives
real_folk_blues
8

Thaî, glande, et Ryan erre.

Only God Forgives n’est pas un bon film. N’allez pas croire que vous verrez Drive, pauvres naïfs. N’allez pas espérer que Fight Club se soit payé un lifting, pauvres consommateurs. Ne supputez point...

le 3 juin 2013

149 j'aime

32

Only God Forgives
Gand-Alf
6

... Et l'enfer le suivait.

Pour avoir une idée de mon expression dépitée à la sortie de ma séance de "Only god forgives", je vous invite à vous poster devant un miroir et de vous observez en train de diviser 1356, 876543 par...

le 24 mai 2013

142 j'aime

13

Only God Forgives
Anyo
8

Le langage du silence

Le cinéma est un art Visuel et Auditif. Notre cher réalisateur Danois acquiesce et nous livre une oeuvre à la facture audio-visuelle irréprochable. "Only God Forgives" rejoint "Samsara" et "The...

Par

le 24 mai 2013

140 j'aime

11

Du même critique

Mariage à l'anglaise
aigre_doux
4

Ne jamais se fier à une bande annonce.

Film d'autant moins drôle que l'humour y est lourd et inadapté pour ce genre d'autocritique de la comédie anglo-saxonne. Les acteurs ont l'air beaux et charismatiques mais on leur fait dire les pires...

Par

le 22 avr. 2013

1 j'aime

Only God Forgives
aigre_doux
6

Ce qu'aurait pu être Drive si Kavinsky s'était abstenu.

La dorure de la précédente réalisation de Nicolas Winding Refn ne peut décemment être justifiée que par la présence du DJ dans la bande originale du film et le nombre de hipsters s'étant rués dans...

Par

le 30 mai 2013

1