Il y a une chose que le film montre très bien c'est l'extraordinaire difficulté qu'il peut y avoir à mesurer la souffrance de quelqu'un qui a décidé d'en finir avec la vie. Et la difficulté de contrecarrer un tel projet.
Car après tout, Anders est un beau et grand jeune homme, relativement sûr de lui, plutôt intelligent et qui collectionne les conquêtes féminines. Il habite une belle capitale dans un des pays les plus riches et les plus ouverts qui soient.
La garantie du bonheur ? Hélas non. Anders compose comme il peut avec un mal être qui lui colle à la peau. Depuis des années, devine-t-on. Les autres veulent son bien être ? Lui trouvent du travail, des soirées et des amis ? La belle affaire ! Toutes ces briques du bonheur auquel tout un chacun aspire semblent dénuées de sens et inutilisables pour Anders.
Et autant que la difficulté des autres à le comprendre, c'est son incapacité à mettre des mots sur ce qu'il ressent qui parait insurmontable, comme dans cette scène où Anders tente en vain de se justifier auprès d'un employeur pourtant bienveillant.
Tout cela est très bien mis en scène par Joachim Trier. Par de longs plans introspectifs où l'on voit Anders devenir autiste à sa propre vie. Et même si, ici où là, surgissent des éclairs de joie : la balade en scooter, le morceau de piano...ils n'apporteront que de brefs répits dans un état de souffrance.
De ce point de vue, le film pose avec beaucoup de justesse la question du mal de vivre et celle, très prégnante, du suicide dans les pays scandinaves. Et en même temps ce sont les limites d'un film terriblement pessimiste qui, poursuivant jusqu'au bout la trajectoire implacable de son personnage, nous laisse nous aussi sur le carreau.
Un beau film malgré tout qui annonce déjà dans les thèmes et dans la forme, l’œuvre plus complexe et plus maitrisée que sera Back Home.
Mise en scène : 8/10
Personnages/Interprétation : 7/10
Histoire/scénario : 7/10
7/10