Retour en petite forme pour Ann Hui qui délaisse pour une fois la période contemporaine pour honorer sans doute une œuvre de commande. Ann Hui étant Ann Hui, il ne valait pas s'attendre non plus à ce qu'elle livre un pur film de propagande. Et on atteint en réalité rapidement les limites du projet qui ne veut pas tomber dans les conventions du genre ou dans la reconstitution spectaculaire mais elle ne parvient pas à imposer un direction claire, cohérente ou tout simplement prenante. Je n'arrive pas à savoir si la cinéaste n'a pas réussi à s'approprier le sujet ou si elle l'a tourné sans réelle conviction. Par contre, on voit bien qu'elle a l'air un peu perdu et n'imprime pas d'unité. Elle injecte des touches personnelles avec notamment quelques parenthèses faussement documentaires où Tony Leung Ka Fei se fait passer pour un vieux résistant interviewé et narrant ses (faux)souvenirs. Elle déplace aussi le cœur du film sur un personnage féminin, loin des valeurs héroïques et patriotiques attendues, qu'elle pastiche un peu d'ailleurs. La structure joue également de plusieurs ellipses et d'une légère dimension chorale.
Le problème est que tout cela est très froid et surtout fort peu impliquant pour des personnages floues et trop éloignés. L'univers ne prend pas et on ne croit pas vraiment ni aux contextes ni aux personnages qui ne sont pas crédibles, la faute sans doute à cette structure maladroite passé-présent qui ne tient pas vraiment debout.
Indépendamment, il y a quelques bonnes séquences notamment le meurtre d'un espion dans la pension de l'institutrice avec une violence froide et fulgurante, doublé d'un efficace humour noir ou encore lorsque des résistants croisent des japonais sur un chemin de campagne. Mais dans l'ensemble, le suspens ne fonctionne pas vraiment, les personnages ne touchent pas et on aimerait que le rythme décolle. C'est un peu le cas dans le dernier tiers qui devient plus linéaire et resserré à un ligne narrative plus traditionnelle mais qui souffre cependant de divers fautes de goût (la glissade avec les balles numérique).
Reste un joli épilogue qui bénéficie d'une excellente idée qui unifie les deux temporalités.
L'ennui poli et la frustration sont quand même les sentiments prédominants.