Histoire romantique de démons chinois.
Painted Skin c’est l’adaptation libre de l’une des nouvelles de Pu Songling issue de son recueil Contes étranges du studio du bavard. Adapté déjà deux fois, la première en 1966 par Fong Pao et la seconde en 1993 par King Hu (sans compter la version série télévisée de 2011), le conte s’offre un lifting sauce new-wave HK, incorporant la plupart des éléments que l’on y retrouve, que ce soit les CGI ou le process HD. Néanmoins, si la bobine s’ouvre sur une succession de scènes d’action riches en wushu et gunshu, les choses se calment très vite pour se centrer sur la romance, à la manière d’un Tigre et Dragon. D’ailleurs le réalisateur Gordon Chan semble avoir ce film en tête durant toute la réalisation de sa pellicule, tant il tient à redoubler d’enchantement à chacune de ses scènes. Cependant il commet d’évidents ratés, que ça soit lors d’une poursuite sur les toits de la cité durant la nuit, coupés par un bref shot en CGI d’une horreur sans nom. Puis des fois il semble s’écarter de son sujet en faisant faire à Betty Sun, incarnant une chasseuse de démons, toutes sortes de pitreries assez malvenues et cassant le côté lyrique de la chose. Un côté qu’il faut évidemment imputer au duo d’actrices Zhou Xun et Zhao Wei, sublimant l’oeuvre comme rarement on a pu le voir auparavant. L’une incarne la félonie avec un visage d’une pureté absolue, alors que l’autre toute aussi virginale, incarne l’amante qui sent son bien-aimé lui échapper.
L’ensemble tranche donc avec les précédentes versions qui en ont été faites, abandonnant l’horreur pour donner un côté bien plus humain à ce démon mangeur de coeurs.
Le film aurait pu s’endormir sur la romance et évidemment endormir aussi son spectateur, mais heureusement il arrive à réinjecter suffisamment de séquences d’arts martiaux, afin que les fans de Donnie Yen en aient un minimum pour leur argent.
Chan sait — presque — toujours où situer ses frontières et c’est ce qui réussit à faire de Painted Skin un film complet, ne s’abandonnant pas trop dans un genre au détriment d’un autre. On pourra reprocher cette prise de position qui offre une bobine populaire, en plus de tirer inévitablement les larmes, point de vue qui sera à laisser à l’appréciation du spectateur.
Autre point qui vient une nouvelle fois taper aguicher l’amateur de cinéma asiatique, le réalisateur a limité au maximum l’utilisation de CGI, notamment durant dans sa séquence finale, où les maquillages façon théâtre chinois s’imposent là où d’autres auraient préféré imposer du grand spectacle. Maquillages et cheveux deviennent blanc nacre, soutenus de larmes rouge sang, simple, mais morbide autant que cela est doux à l’oeil.
Painted Skin se révèle être une réinterprétation étonnante et magique, comblant le spectateur venu voir un produit moderne sans pour autant être racoleur. Il réussit à distiller sa fable durant deux heures sans ennuyer son spectateur, même si par moment le tout bat un peu de l’aile à cause de choix modérément judicieux (dont le caméléon, assez décevant). Reste que Zhou Xun et Zhao Wei en font un produit inoubliable, tout comme Donnie Yen, bien qu’il soit évident que celui-ci ne tient en revanche pas ici son plus grand rôle, étant bien plus un faire valoir qu’un personnage au premier plan.