Troisième et donc dernier volet de la série Paradis, Paradis : Espoir vient clore de manière assez douce la trilogie initiée par le réalisateur Ulrich Seidl et sa femme scénariste Veronika Franz. Paradis : Espoir est sans doute le plus abordable et le moins perturbant des trois films, on pourra même y déceler pour une fois une forme de bienveillance bien peu habituelle chez le réalisateur.
Dans Paradis : Espoir nous allons suivre la jeune Mélanie, une adolescente de treize ans en surpoids qui fait un séjour dans un camp d'amaigrissement . Sur place elle va se lier d’amitié avec d'autres filles comme elles et surtout tomber amoureuse du médecin du camp de 40 ans son aîné.
Mélanie est à la fois la fille du personnage principale de Paradis : Amour et la nièce de Anna Maria, la bigote masochiste de Paradis : Foi (Putain quelle famille). Elle se retrouve donc ici perdue au milieu de nulle part dans une sorte de lycée abandonné pour l'été et entouré d'une immense forêt. Mélanie est donc ici afin de perdre du poids sous le triple commandement d'un professeur de sport, d'une diététicienne et d'un médecin. Quand on connaît un peu la rugosité dont est capable Ulrich Seidl que ce soit dans la représentation des corps, la dissection des comportements humains et dans ses provocations misanthropes on pouvait craindre le pire avec un film âpre, dérangeant et difficile dans son approche d'un sujet ultra sensible décrivant une relation amoureuse entre une adolescente obèse et un vieux beau médecin de cinquante balais. Il n'en sera finalement rien et Paradis : Espoir décrit une relation certes borderline mais assez touchante entre une adolescente qui se cherche autant dans son corps et son rapport aux autres, que dans ses sentiments et sa sexualité. Avec un père absent et une mère partie s'encanailler au Kenya (Voir Paradis : Amour) la jeune Mélanie semble bien trop seule pour affronter les tourments de l'adolescence et elle va trouver dans ce personnage de médecin une figure paternelle et bienveillante qui fatalement la fera fondre au sens propres comme au figuré. Ulrich Seidl nous épargne donc, comme il semble épargner à ses personnages, une exposition trop explicite de leurs corps et des dérapages traumatiques. Le réalisateur semble d'un coup avoir un regard bienveillant envers ses personnages comme pour leur donner l'infime espoir de trouver leur place dans le monde. Même au cœur d'une relation trouble et riche en tension sexuel et en désirs dans laquelle on joue au docteur et l'on s'enlace tendrement ce médecin gardera le cap et la distance pour ne pas sombrer dans l'interdit. De même lorsque saoule et vulnérable Mélanie sera à deux doigts d'être violée dans une boîte de nuit miteuse, un adulte interviendra in extremis pour lui garantir de continuer son chemin sans traumatisme à porter. Il est peut être là l'espoir du titre, dans le fait que même Ulrich Seidl, qui n'est pas réputé pour son amour indéfectible de l'humanité, laisse une chance à cette jeunesse aussi paumée soit elle de s'accomplir.
Il se dégage même de Paradis : Espoir une sorte de tendresse diffuse et très agréable envers cette bande d'adolescents et d'adolescentes qui se retrouvent malgré leurs différences physiques avec des comportements universelles de jeunes garçons et de jeunes filles. Confidences sur l'oreiller, bières, fous rires, baisers candides, clopes partagées, bataille de polochons resteront au quotidien de la bande en dépit de la surveillance d'un prof de sport autoritaire à la discipline stricte et militaire. Toutes les séquences de confidences et de petits secrets échangés sur le sexe et la vie entre la blonde Mélanie (Mélanie Lenz) et son amie brune Verena (Verena Lauher) sont d'une profonde justesse avec deux jeunes comédiennes bluffantes de véracité. On retrouve bien sûr toujours chez le réalisateur ce même sens du cadrage et d'une composition géométrique et symétrique des images mais cette fois il y-a de la vie et surtout des sentiments qui font vibrer un peu le carcan visuel trop rigide du cadre.
C'est donc sur une note d'espoir et presque de douceur que Ulrich Seidl vient clore sa trilogie Paradis. On est pas encore dans la légèreté absolu de la comédie adolescente mais clairement Paradis : Espoir est l'un des films les moins plombant de son réalisateur.