I just feel like there's something outside of normal life.
Paranoid Park est un film simple, un fait relaté en une heure et vingt minutes. On prend son temps, accompagné par une ambiance douce, planante, sereine, reposante, aussi bien visuelle que sonore. Les acteurs sont naturels parce que Gus leur a laissé écrire leur propre texte, on en trouve du monde sur MySpace, 2971 auditionnés à vrai dire. Les quelques erreurs de narration viennent peut-être de là, d'ailleurs. Donc Gus a pris quelques boutonneux, sachant plus ou moins se rendre crédibles devant la caméra, et leur a collé un scénario prêt à chauffer, le tout après avoir lu le joli roman de Blake Nelson, qui a charmé le réalisateur, lequel a fait chauffer son crayon pour pondre le scénar en pas moins de deux jours.
Le long-métrage se déguste lentement, les répétitions ne nous gênent en rien, au contraire, car elles collent tout à fait au comportement du personnage principal, Alex, interprété par G. Nevins. Alex a une bonne gueule, son frère est marrant, sa copine est chiante par contre, mais on s'en fout, il va la larguer, on le sait vite d'ailleurs. Alex fait du skate, pas mal du tout en plus. On nous glisse par-ci par-là de très beaux passages de skate old-school à la fisheye dégueulasse, et on en redemande. Alex nous claque un flip par-là, un ollie par-ci, puis il est fatigué, comme tout le temps, il aime pas la vie aussi. Puis d'un coup, Jared, son pote, lui propose de faire un tour à Paranoid Park, Alex n'est pas prêt, mais qu'est-ce que tu veux... "No one's ever really ready for Paranoid Park."
Alex, toujours aussi blasé, décide d'y aller, il vous racontera comment dans le film. Il tombe sur des mecs, un peu louches, ils aiment bien l'évasion, ça tombe bien lui aussi en a vraiment besoin, ses parents viennent de se séparer, sa copine lui casse les noix, et il pleut. Son skate sous le bras, il monte dans un train clandestinement, un peu comme dans l'Empereur du Nord de Aldrich (l'allusion y est flagrante) où il va en être chassé de la même manière (à coup de lampe torche ici), mais dommage pour le gardien, parce que lui va se retrouver sous les rails d'un autre train. Avec ça on aura un petit plan assez jouissif sur le gars en train de ramper avec ses bras, lui manquant la partie inférieure de son corps, très réussi.
Bon, tout ça pour dire qu'Alex a vraiment les boules, à cet âge, on tue pas beaucoup de gens, donc il flippe un peu, il prend des douches de 3h, change d'habits, jette sa planche dans un fleuve... Mais au-delà de l'adolescent pris de culpabilité et asséné de questions sans réponse, c'est avec une photographie idéale, un tantinet ennuyeuse que Gus nous raconte cette histoire, et qui témoigne d'une réelle beauté de l'expérience de cette adolescent, le montrant réellement en état de panique. C'est cette contradiction que l'on aperçoit durant tout le film, les longs silences, les quelques bruits qui viennent les perturber, de la même sorte que l'enquête policière qui vient lui troubler les idées.
Sir Van Sant signe une réalisation plaisante et agréable mais qui ne plaira pas à tout le monde, le tout est léger, un peu comme un brouillon, prévisible parfois, ça fout un peu les boules aussi de se dire qu'on s'est tapé 1h20 de film tout ça pour voir un ado prendre des douches et cramer son carnet de fillette... Mais moi, bizarrement, j'ai aimé ça. La musique devait y être pour quelque chose, dédicace à Elliott Smith.