Innocence
Primé à Cannes, j'avoue être allé à reculons devant le film surtout après l'expérience ou plutôt les expériences — car il s'agit de deux choses très différentes — mitigées que furent Gerry et...
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le 1 nov. 2011
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Le réalisateur Gus Van Sant met en scène un adolescent face aux conséquences d’un délit commis dans *Paranoid Park* (2007). Après le visionnage d’*Elephant* (2003) mes attentes techniques étaient chargées pour ce nouveau film. En effet, le plan-séquence d’*Elephant* de l’errance lycéenne filmé au steadycam m’a marqué. Est-ce que *Paranoid Park* va relever le niveau du précédent film vu ?
Nous suivons donc le jeune Alex (Gabe Nevins) qui écrit pour se soulager d’un acte des plus horribles. Cet écrit apparaît sous forme de lettre et se révèle être le récit du film. En s’attardant sur le protagoniste, il figure comme le stéréotype d’un lycéen américain des années 2000. Il porte des *baggys*, *t-shirts*, une casquette qui cache ses longs cheveux et tient à la main, son *skateboard*. Alex est passionné de ce sport qu’est la planche à roulettes. Un objet qu’on retrouve dans tout le film et qui caractérise le personnage. Je l’interprète même comme une addiction de part la récurrence de ces apparitions. Alex partage cette passion avec son meilleur ami Jared (Jake Miller). Ils se retrouvent tout les deux dans un lieu éponyme au titre de l’oeuvre décrit comme isolé et illégal aux yeux de la police. *Paranoid Park* est un *skate park* où de nombreuses personnes se regroupent afin de glisser toute le nuit et de figurer au plus haut parmi les pratiquants. Jared se lance sur la piste alors qu’Alex reste à part de l’événement par manque de confiance en lui. Cette mise à l’écart permet l’arrivée de la future destinatrice.
L’ado fait connaissance avec trois *skaters*. Jolt (Brad Peterson), Macy (Lauren McKinney) et Scratch (Scott Patrick Green). Macy devient l’amie et la confidente d’Alex et Scratch, le déclencheur du drame. En regardant le film, les évènements sont amenés dans le désordre comme le mentionne Alex, lorsqu’il écrit. Lorsqu’il témoigne, il y a une alternance du cadre spatio-temporel entre le lycée et cette fameuse soirée.
Ci-dessus, je vous ai fait part que ce jeune homme souhaitait s’exprimer par rapport à un acte passé. Cette action est la tension du film. Elle apparaît au lycée lorsque tout les *skaters* de l’établissement scolaire se retrouvent à s’entretenir avec l’inspecteur Lu (Daniel Liu). L’inspecteur leur fait part du meurtre d’un ami. Un agent de sécurité (John Michael Burrowes) est retrouvé démembré sur les rails du chemin de fer situé à côté du *skate park*. Le plus marquant est la trace sur le crâne de la victime. Elle semble avoir été commise par une planche de skate. De plus, le crime se serait passé lors de la soirée où Alex figurait. Le *teenager* ment lorsqu’on l’interroge mais sa lettre nous raconte tout. Il avoue son crime mais se défend en disant que c’était un acte de défense. La question est : que faisait-il là ?
La réponse à cette interrogation est l’envie commune de tout adolescent : se comporter comme un adulte. Le point de départ est la rencontre entre Scratch et Alex. L’individu lui propose une bière. Ils s’en vont tout deux au chemin de fer et montent sur un train. Ainsi, l’agent de sécurité arrive avec une matraque afin de les faire descendre. Scratch, l’adulte, s’enfuit et Alex reste. Il se fige et finit par frapper l’agent puis, le regarde tomber sur le traffic d’en face. Le protagoniste est nez à nez avec les restes de sa victime, sa bêtise. Il s’enfuit avec remords. À présent, il cherche à en parler, d’abord à son père mais il se résigne puis, il s’adresse à Macy comme elle lui avait conseillé de lui écrire ce qu’il avait sur le coeur.
Ce film raconte le vécu de l’adolescent face à son crime et à son aveu : acte et conséquence. Alex avoue et aucune suite… L’injustice provoquée par le film est l’absence de jugement. Le générique défile sans que vous le voyez se faire arrêter. Les dernières images sont les souvenirs heureux de la bande de sportifs du lycée, dont Alex.
D’ailleurs, ces souvenirs apparaissent régulièrement sous forme d’ellipses dans le film. Elles sont toutes accompagnées d’un fond sonore ou d’une musique extradiégétique électronique qui résume ce qu’il se passe à l’écran ou dans la tête du meurtrier.
Pour terminer avec la tension du film, les tournures scénaristiques tels que le changement du *skate* d’Alex, de ses vêtements ou même son mal-être/vertiges font penser que c’est lui, le meurtrier. L’élément le plus marquant reste tout de même le *flash info TV* qui affiche les restes de la victime. L’adolescent ne reste pas insensible face à son écran. Ce qui terrifie le plus Alex est que lui seul à réellement vu ce corps à l’agonie et est à l’origine de ce massacre. Le film a une mise en scène intéressante.
Pour conclure, nous sommes dans la tête de l’ado. Les spectateurs passent d’Alex, le jeune lycéen à un meurtrier. Pleins d’étapes variables de l’adolescence sont mises de côté lorsqu’on apprend la nature d’Alex tels que la sexualité, les relations amoureuses, la séparation parentale, le sport, la passion, l’insouciance. Ces différents thèmes non-exploités mettent en avant le pré-passage adulte de l’être. Est-ce que ce film en serait pas un récit d’apprentissage ?
Stuby
Créée
le 11 juin 2020
Critique lue 1.1K fois
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