Que le film Parasite ait pu être récompensé de la Palme d’Or à Cannes et de quatre Oscars, les plus prestigieux (film, scénario, réalisateur, et film international), cela pourrait bien s’inscrire dans l’histoire du cinéma comme le plus grand mystère.
La première moitié du film, celle de l’ascension sociale accélérée de la famille de Ki-Taek, se déroule de façon plus qu’honorable. Malheureusement, à partir de ce moment, le scénario dérape complètement et aboutira à une véritable bouillie pour les chats, avant son couronnement parfaitement nunuche, au moment des retrouvailles du père tueur irrationnel avec son fils devenu assez riche pour s’installer à la place des anciens riches.
Vu dans son ensemble, ce scénario semble tellement alambiqué qu’on a peine à croire que le tournage ait débuté sur une telle assise. On a presque l’impression qu’en découvrant l’escalier menant au bunker de la somptueuse résidence, le réalisateur aurait eu l’idée d’en tirer profit dans une nouvelle histoire sans véritable lien avec ce qui précédait.
En effet, on a beaucoup glosé sur la thématique des rapports entre riches et pauvres, mais même cette dimension se perd complètement au moment où l’histoire bascule dans un rapport entre la famille de Ki-Taek et ce couple invraisemblable dont le mari aurait vécu dans son trou depuis longtemps. Pendant ce temps, le rapport entre les ex-pauvres et les riches (plutôt gentils en l’occurrence) s’évapore, jusqu’à l’assassinat complètement incompréhensible du riche par le pauvre. S’il y a un quelconque message social dans cette saga abstruse, j’aimerais bien que les grands critiques savants qui l’ont couronnée nous l’expliquent au lieu de se contenter d’aligner les épithètes dithyrambiques.
Ce qui reste intéressant dans cette histoire, c’est son couronnement, y compris l’Oscar du meilleur scénario original. J’ai perdu mes derniers cheveux en me grattant la tête pour tenter de trouver une explication, soit dans mes propres lacunes de simple consommateur, soit dans le processus obscur par lequel les grands bonzes s’entendent entre eux pour s’extasier ou dédaigner.
J’avoue avoir échoué. J’avais pourtant réussi à trouver une explication qui se tienne au couronnement similaire du film Le Démineur, de Kathryn Bigelow, lui aussi amplement récompensé, avec six Oscars, y compris les plus prestigieux.
Pour Parasite, le mystère reste entier à mes yeux, à moins qu’on puisse envisager que dans la tête des juges, les paramètres d’évaluation pour un film « étranger » (rebaptisé « film international ») soient sans commune mesure avec ceux qu’on utilise pour le cinéma « national » .
Cette hypothèse, certes dérangeante, ne pourra jamais être testée, à moins de recourir à l’imagerie mentale et d’obtenir la collaboration des juges impliqués. Peut-être aurait-elle néanmoins le mérite d’être congruente avec le fait que Parasite est le premier film « international » à être ainsi couronné, tandis que Le Démineur a été le premier film réalisé par une femme à le faire.