Repost Letterboxd:
Un drame politique comme je les aime pas. Enfin honnêtement je préfère la politique à l'écran que la politique tout court. C'est La Chinoise de Godard mais par Bertolucci. Il y a beaucoup de ressemblances et ils dénoncent tous les deux la guerre du Vietnam en passant par la jeunesse engagée et les étudiants. Là où Godard avait fait un huis clos avec des étudiants préparant un acte terroriste pour prouver leur mécontentement, Bertolucci (un marxiste dans l'âme) met en scène un acteur/réalisateur tout aussi engagé Pierre Clementi (qui avait déjà réalisé "La Révolution n'est qu'un début continuons le combat" en filmant les marches de Mai 68) dans une adaptation du Double de Dostoievski revisité en fonction des événements. Giaccobe, le protagoniste sans valeur, subit une crise personnelle/existentielle ce qui en vient à lui faire apparaître un double ayant plus de valeur. Il va donc se servir de lui pour réaliser ce qu'il n'a pas pu faire lui même tout en restant caché (séduire Clara et réaliser son spectacle avec des étudiants en classe de théâtre pour justement dénoncer la guerre et montrer le mécontentement d'une jeunesse qui prône la libération sexuelle et un renouvellement dans les régimes. Un spectacle qu'il appelle: de l'imaginaire). Tout ça dans une mise en scène méticuleuse rempli de bleu, de rouge, d'étoiles, de drapeaux du Vietnam, de livres, de guillotines et d'art. Beaucoup de plans fixes et de travelling. Parfois même la caméra tourne pour créer une sensation de vertige (du moins c'est ce que j'ai ressenti).
Giaccobe (le double ayant des valeurs) finit même par s'adresser directement aux spectateurs avec à côté de lui une guillotine et son double, en nous disant que nous avons tous en nous ce double qui nous surpasse et que, pour cela, nous évitons. Et qu'il ne faudrait pas l'éviter mais plus l'inviter à entrer pour qu'il nous aide. Comme si nous devions enterrer notre innocence (notre Giaccobe sans valeur) pour ouvrir les yeux sur la situation actuelle. Le Giaccobe "innocent" finit même par s'installer sur la guillotine pour finalement retirer ses bouchons d'oreilles (peut être pour s'ouvrir au monde).
Bertolucci en se servant de ses pensées marxistes et du talent phénoménal de Clementi a réussi à pondre un drame politique plus que réel malgré ses côtés fantastiques (comme le combat de Giaccobe contre son ombre gigantesque).
Et honnêtement je préfère largement voir deux Clementi à l'écran (il joue incroyablement bien) plutôt que deux Alain Delon... j'avais assez souffert devant Histoires Extraordinaires sorti la même année d'ailleurs.
Je ne comprend pas pourquoi ce film de Bertolucci est si mis de côté... et Clementi mérite beaucoup plus d'attention.