Film soviétique hanté par l’idéologie communiste quoique prenant sa distance avec le film de propagande grâce aux sages nuances qu'apportent la fin du film, Pas de gué dans le feu souffre d'un piètre montage (destruction partielle de la pellicule?) nuisant à la cohérence du propos et d'une certaine lenteur, due à la stagnation de l'intrigue dans ce train/hôpital toujours à l'arrêt, que l'indigente esthétique, à l'image de la mise en scène, ne comble hélas que trop peu.


L'U.R.S.S. qui y est dépeinte est ce sempiternel grand corps malade et incurable que l'on retrouve dans la grande littérature russe (en passant par Dostoïevski, Tchekhov, Tolstoï ou le moins connu Gontcharov) et qui n'échappe pas à un destin tourmenté où la misère, l'affliction, la prostitution, le sacrifice de l'individu pour l'Idée commune interdit tout plaisir. Ces nombreux drames entremêlés forment la tragédie d'une nation sur laquelle l'inexorable plane. La joie n'y est que rarement admise, et l'espoir pour ceux qui croient encore au rêve bolchevique est la maigre flamme qui brûle dans cette plaine immense et désertique. Là, aucun changement n'est envisageable, ce train à l'arrêt servant d'allégorie d'un système ne menant nulle part et condamnant d'emblée ses passagers.


Il y a bien l'amour qui perce parmi cette brume tenace où l'être se dissout, mais celui-ci aussi est contrarié car il est la réalisation d'un souhait personnel et non la volonté de contribuer au bien-être collectif. La musique va dans le même sens, que l'on entend au loin et qui ne peut égayer personne tant chacun est affairé à faire tourner la grande machine marxiste. L'art, d'ailleurs au centre du film, ou plutôt en arrière-plan, vient nommer ce qu'on tait alors, par le silence cru et cruel de l'image.


Ce n'est guère que la marche des militaires en faction qui arrive à insuffler le temps d'une scène magnifique la possibilité d'un Départ et ravive sur les joues pâlies par la souffrance le feu intérieur que couvent leur nuit. Puis le convoi passe et le destin implacable s'abat, éteignant toute lumière. Tel est le sinistre mais réaliste tableau que Panfilov nous peint.

Marlon_B
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le 10 avr. 2017

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