Au début des années 90, et avec le succès des films de Seagal, la Warner a plein de projets pour lui, trop même, au point qu’il ne peut pas tous les honorer. Pour l’année 1992, ils veulent faire avec Saumon Agile deux bobines, Passager 57 et Piège en Haute Mer. Ce dernier film va pas mal occuper Seagal et comme les deux films vont être tournés en même temps, la Warner décide donc de faire le film sans lui, proposant à des personnalités comme Sylvester Stallone, Eddy Murphy ou Denzel Washington. Entre le refus des uns, le planning chargé des autres, c’est finalement Wesley Snipes qui héritera du rôle principal pour ce qui sera son premier gros film d’action d’une longue série dans les années 90. La Warner met à la barre Kevin Hooks, spécialiste des séries TV qui avait l’année auparavant mis en scène Strictly Business (1991), et qui fera par la suite Liens d’Acier (1996) et Black Dog (1998), un novice dans le cinéma qui fera malgré tout son office et qui fera de Passager 57 certes pas un énorme succès au cinéma (45M$ au box-office pour 15M de budget) mais un incontournable des vidéoclubs dans les années 90.
Après le succès de Piège de Cristal en 1988, puis de sa suite 58 Minutes pour Vivre en 1990, on a vu se pointer tout un tas de clone de la saga initié par John McTiernan dans les cinémas ou directement en VHS. Autant le dire tout de suite, Passager 57 est de ceux-là. Le scénario est un peu mince, il est vrai, tout comme les personnages qui manquent un peu de profondeur. Et quand ils en ont un minimum, comme celui de Wesley Snipes, ça repompe allègrement ce qui a été fait avant (coucou Riggs dans L’Arme Fatale) mais pour ce genre de film d’action post Die Hard, c’est largement suffisant et le spectacle proposé est divertissant. Nous sommes une fois de plus dans la mécanique du héros qui se trouve au mauvais endroit au bon moment et jamais le film ne cherche à surprendre, à intégrer des rebondissements, et se contente de jouer sa partition comme on s’y attend. L’ensemble est très bien rythmé, ne laisse que peu de temps de répit au spectateur, avec des scènes d’action efficaces qui maintiennent l’attention sans aucun souci. Bien qu’il n’y ait rien de réellement original ici, ça fonctionne plutôt bien. Le film sait bien gérer sa tension, il n’hésite pas à être assez violent lors des meurtres. Alors oui, la suspension d’incrédulité est mise à mal, et si on réfléchit un peu trop, on voit aisément de très nombreux défauts et incohérences, à commencer par le grand méchant qui, quoi qu’il arrive, a toujours le dernier mor sur ce qu’il se passe. Les méchants ont une énorme facilité pour faire passer des armes au contrôle de l’aéroport et à s’infiltrer dans le personnel (jusque chez les hôtesses de l’air). Mais c’était le cas de tous les films d’action de cette époque et c’est aussi ce qui fait leur charme quelque part.
Le film est conscient de ce qu’il est et ne se prend pas toujours au sérieux, balançant des répliques réellement funs, quoi qu’un peu faciles, mais bien dans la continuité de ce qui faisait le charme des films d’action des années 80. Wesley Snipes s’en sort parfaitement dans ce rôle badass et dans les années 90, il faisait partie de ces têtes sur qui on pouvait compter dans le genre avec des bobines telles que US Marshall, Money Train, Blade, Demolition Man ou encore Drop Zone. Bruce Payne (Full Eclypse, Highlander 4) est également très efficace dans ce personnage de méchant intelligent mais psychotique. Le reste du casting les épaule très bien, que ce soit Tom Sizemore (Heat, Il Faut Sauver le Soldat Ryan) ou la toute jeune Elizabeth Hurley (Endiablé, Austin Powers) même si cette dernière ne semble pas être très à l’aise dès qu’elle a un pistolet en main. Wesley Snipes se donne à fond, assurant une bonne partie des cascades lui-même. Il est en pleine forme et même assez impressionnant dans les combats mano à mano (rappelons qu’il est Ceinture Noire de karaté et très bon pratiquant de capoeira). Il est en mode badass cool qui sort des punchlines du genre « Bruce Lee, tu connais ? » après avoir filé un gros coup de panard à un sbire. La mise en scène de Kevin Hooks n’est pas exceptionnelle mais malgré tout suffisante par rapport à ce qui est proposé. Les scènes d’action restent toujours lisibles, les combats mettent plutôt bien en valeurs les capacités athlétiques de Snipes, et c’est déjà pas mal !
Avec Passager 57, il ne faut pas s’attendre à un gros blockbuster. Mais le film fonctionne plutôt bien pour ce qu’il est, à savoir une série B efficace. Dommage, il manque l’étincelle nécessaire pour l’élever au-dessus de la masse et, malgré son côté divertissant, il reste oubliable.
Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-passager-57-de-kevin-hooks-1992/