Grand Corps Malade et son meilleur ami Mehdi Idir réalisent leur premier film basé sur le bouquin retraçant l'histoire vécue par le premier. N'étant pas fan du garçon mais lui reconnaissant un certain talent, j'ai été le voir avec quelques appréhensions. Les films mettant en scène des jeunes handicapés sont généralement soit larmoyants, soit peu réalistes. Difficile de trouver un juste milieux tout en restant percutant... Or ici, c'est le cas.
Tu as quoi? -Tétraplégique incomplet... -Ah, ben cool!
Cela commence par une immersion dans la peau du héros. Faible, impuissant, ne comprenant pas ce qu'il lui arrive. On voit à travers ses yeux et directement on comprend ce que le personnage va devoir endurer. Le film retrace donc le passage de Ben dans un centre de rééducation suite à l'accident le plus con du monde. Et au fur-à-mesure de ses progrès moteurs, le champ de vue de la caméra va s'élargir petit à petit. Mais si Ben y arrive, c'est grâce à sa bande de potes, qui tous handicapés, puisent les uns dans les autres une force d'avancer ainsi que le moyen de niquer des heures! Parce que quand tu es paralysé, ton premier ennemi, c'est le temps...
La première chose qui frappe, c'est le ton du film. Il est juste. Les Patients ne sont pas des héros. Ils sont vaillants à certains moments, des blaireaux à d'autres. Et cela vaut aussi pour Ben sur qui le récit est centralisé. L'humour et la tristesse se mélangent tout au long du récit, et parfois vont de pair. Cela nous offre une belle prise de conscience sans jamais nous mettre mal à l'aise. Une bande de mecs de 20 ans agissant comme des mecs de 20 ans mais en fauteuils... Dans le cinéma français, il est très rare de voir la jeunesse dépeinte d'une manière réaliste, cela fait du bien quand c'est le cas. On tombe donc dans du tragique sans jamais ressentir la pression d'un drame, on tombe aussi dans du comique sans jamais être noyé dans la comédie, et on ne tombe jamais dans le mièvre. Cela nous permet de saisir une certaine réalité de l'handicap au-delà du gros engin à roulettes...
Ca veut dire quoi pêcho quand tu es dans un fauteuil roulant?
Le tout est filmé avec une certaine pudeur. L'handicapé reste digne et on ne le montre pas trop galérer sur des choses du quotidien ce qui permet de ne jamais tomber dans le pathos facile. Bien que de nombreuses scènes nous évoquent rapidement les difficultés que ce nouvel apprentissage amène. C'est également une ode à la vie. Espoir et désespoir se croisent dans ces centres; vie et mort également... Pour s'en sortir, il faut s'accrocher mais surtout, accepter de changer ses espoirs. Et c'est en accomplissant des gestes cons que la vie reprend son cours.
Les acteurs entièrement composés d'inconnus (mais qui ne le resteront sans doute pas très longtemps) sont très bons. Jouer les invalides quand on est en pleine possession de ses moyens n'est pas aussi facile que cela peut le sembler. Mais s'ils sont si bons, c'est parce qu'il y a une certaine harmonie qui se dégage entre eux. Comme un vrai groupe de copains. Harmonie embellie par la belle Samia (Nailia Harzoune).
La BO est un petit régal pour les gamins ayant été nourris au hip-hop des années 90's. Le jeu des lumières est sympa également même si les plans du film ne sont pas fous et qu'un jeu de couleurs aurait pu être facilement utilisé dans le contexte hospitalier mais cela reste propre. Sans plus.
Bref, un film très réussi et apportant une vision réaliste de l'handicap mais aussi de la jeunesse et ses espoirs. Une belle ode à la vie simple souligné par un très bon casting sans le besoin de mettre en scène des acteurs connus. À voir!
PS : J'ai longuement hésité à mettre un 8 au film mais j'ai peur que l'absence d'une scène se détachant vraiment du film ne le fasse tomber dans l'oubli de ma mémoire qui voit beaucoup trop de choses.