Les gens, ils sont là, ils vous aiment ou ne vous aiment pas.
Parfois il n'y a rien qui se passe, parfois c'est ambivalent, c'est le chaos, ce peut être limpide aussi,
l'attachement peut de la même manière se situer dans toutes les nuances de ces deux extrémités. Les rapports humains n'ont pas de règles ni de convenances, notamment aux yeux du spectateur.
Un jour, il suffit que le doute soit la norme, que les rapports que nous pensons avoir avec les autres tournent à l'ambiguïté comme tourne le lait, que ces idées renversent celles qui étaient préétablies ou acquises - peu importe qu'elles soient avouables ou inavouables, que ces idées nouvelles façonnent une contagion et tout ce que nous pensions être debout s'écroule soudain. C'est comme ça. Pas autrement. Est-ce qu'il y a des questions à se poser ? Non, ce sont des idées comme ça. Elles vous rongent. Elles confinent à la folie. Ou presque. Il n'est pas possible de savoir. Ce dont il est possible, c'est de se sentir coupable que les choses changent, basculent sans notre volonté, notre désir conscient de changer ; il est possible de passer pour incompris aussi, alors que nous étions manifestement le seul à ne pas changer.
"Persécution" colporte à mon sens cet état d'esprit, un peu fourre-tout, un peu trop humain. Dans une ambiance grise, pas de grande remise en question, laissons cela aux autres films. Pas de grands enjeux non plus. Non, il n'y a que des fantômes de la mémoire, des fantômes du réel, ceux de l'entre-deux. Ils viennent côtoyer la trajectoire d'un homme et ils modèlent son vide par leurs absences successives, par leurs choix sans certitude.
Alors, en tant que spectateur, je suis perdu, un peu maudit, sans repère mais ce n'est pas important du moment que le film de Chéreau m'aide à raconter des choses que je pense justes, des choses justes avec une atmosphère singulière et sans concession, elle.
NB : Un jour, j'ai appris qu'au cours de l'embryogénèse, les cellules qui mourraient pour construire les organes creux tels que le cœur ou les poumons jouaient du fait de leur disparition un rôle de même importance dans la construction que les cellules qui étaient programmées pour vivre plus longtemps. Les choses qui sont et les choses qui ne sont pas - à partir du principe qu'elles ont été - participent du même sens.
Je pense que l'existence de Daniel nous convie à penser l'existence comme une interface conditionnée de ces mondes, ceux du concret et de l'invisible, et qu'il est possible que les choix exécutés dans un monde ou l'autre, sans notre consentement, bouleversent les rapports de force de nos trajectoires individuelles, jusqu'à provoquer ou remettre en cause notre propre discernement sur la question de la maîtrise de son devenir.