Avec Personne n'y comprend rien, tout le monde commence à y voir plus clair...

Personne n'y comprend rien est un film documentaire réalisé par Yannick Kergoat dans lequel Fabrice Arfi et Karl Laske, parmi d'autres, prennent le temps d'exposer avec clarté et distinction l'affaire très politique du financement libyen de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy, plus de 17 ans après les faits et 13 ans après sa première révélation publique par Mediapart le 12 mars 2012. C'est le temps qu'il fallait pour mettre en ordre toutes les pièces d'une intrigue rocambolesque, avec son lot de mensonges grossiers, de trahisons en tous sens et de courses pour la gloire et le pouvoir. Une intrigue qu'on adorerait voir dans une fiction policière, mais qu'on se met inévitablement à exécrer quand il s'agit ni plus ni moins d'un des plus gros scandales d’État de la Cinquième République (à vos tops : l'affaire du Crédit Lyonnais ? L'affaire du Rainbow Warrior ?).

Le pari du documentaire est réussi : parvenir, en moins de 2 heures, à mettre en lien tous les éléments importants de l'affaire et les preuves à l'appui des accusations, à faire la lumière sur les liens entre toutes les personnes concernées de près ou de loin (souvent de près) par ces financements libyens ; et, chose précieuse et difficile, à ne jamais perdre le spectateur devant la masse d'informations à retenir, croiser, et recroiser.

C'est un 10/10 peu esthétique : Personne n'y comprend rien est une œuvre dont la banalité du traitement formel est une quasi-nécessité tant le contenu informationnel est dense. Bien sûr, personne ne pleurera de joie sur les jeux de lumière ou la direction de la photographie. Mais serait-ce vraiment approprié ? C'est un 10/10 très politique : parce qu'il est d'intérêt public, pour les profanes comme pour les initiés, de voir ce documentaire et de se rendre compte de la corruption au plus haut degré du pouvoir - qu'il faut corps et âme dénoncer, et contre laquelle il nous faut lutter ! Et, enfin, un 10/10 sui generis : parce que la singularité de l'affaire est telle qu'un documentaire la retraçant ne peut pas être classé dans une catégorie déjà connue et répertoriée.

Bien évidemment, toutes les personnes présentées dans le documentaire et liées à l'affaire sont présumées innocentes... Le procès doit se terminer en avril 2025. Verdict en mai ?