Little Dieter needs to fly et Les ailes de l'espoir sont deux documentaires quasiment jumeaux dans la filmographie de Werner Herzog. Outre qu'ils sont tournés à quelques années (1998 pour l'un, 2000 pour l'autre) l'un de l'autre, ils ont en commun d'être à chaque fois l'histoire d'un ou d'une survivante à un accident d'avion. Avion de guerre pour Dieter, avion de compagnie de vol pour Juliane.
Dans le premier film, l'histoire de Dieter Dangler, elle inspirera plus tard à Herzog un pur film de fiction, Rescue Dawn (avec Christian Bale, assez fidèle pour le coup après coup). S'écrasant au dessus du Laos en pleine guerre du Vietnam, Dangler est très vite fait prisonnier et emmené à la frontière Nord-Vietnam pour y croupir avec d'autres prisonniers. Dès lors dans sa propre survie, il n'aura plus qu'une idée fixe : s'enfuir. Dans le second, l'histoire de Juliane, unique rescapée d'un vol contenant 92 personnes. Ayant survécu quasi-miraculeusement au crash mais pas forcément indemme, la jeune fille d'alors 17 ans tente lentement de sortir de la forêt pour y espérer un peu de secours, les recherches ayant cessées depuis déjà plusieurs jours...
Des films jumeaux où, Werner Herzog dans les deux cas va demander aux rescapés de refaire le trajet qu'ils ont vécus. Cela implique pour l'un de retrouver presque les conditions de survie qu'il a dû subir (pour les besoins du film, Dangler montre donc comment il était allongé au sol, écartelé, puis on l'emmène, les mains liées d'un camp à un autre. En chemin il explique les astuces des soldats pour eux-même survivre avec quasiment rien : faire un feu, maintenir des braises allumées, bâtir un campement avec des grandes branches... Enfin il rejoue presqu'à l'identique ses conditions d'emprisonnement avec les autres prisonniers puis comment lui et un autre américain devenu alors son ami vont pouvoir s'échapper), pour l'autre, de retrouver, à partir du crash, le trajet retour en longeant un ruisseau qui devient ensuite une rivière, puis un fleuve...
Bien que Les ailes de l'espoir ait été mûrement réfléchi pendant un long moment par Herzog (voir sa chronique perso qui fait suite à celle-ci), Petit Dieter doit voler est aussi pour le coup un film très personnel. En faisant raconter au bonhomme sa jeunesse dans une petite ville d'Allemagne près de la forêt noire pendant la seconde guerre mondiale, c'est aussi Herzog qui déroule sa propre vie. Une jeunesse similaire perçue à travers ce compatriote éloigné mais aussi un même désir de vivre. Pour l'un, l'obsession de voler, inaltérable depuis le moment où un avion de guerre balançant des bombes frôlera le toit de la petite maison familiale, pour l'autre, le désir de tourner et surtout voyager constamment (a ce jour, Herzog reste d'ailleurs l'un des seuls cinéastes à avoir "tourné sur les cinq continents". La seule chose qu'il n'a pas (encore ?) exploré, c'est l'espace). Dieter comme Werner frôlera d'ailleurs plusieurs fois la mort (il survivra d'ailleurs à 4 autres crashs par la suite).
En évitant constamment tout idéalisme et tournant presque d'une manière naturaliste en revenant au sujet en lui-même et son ressenti, Herzog comme à chaque fois s'approche silencieusement de la vérité....