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La grande couture est une affaire d’orfèvrerie, un art délicat qui demande une minutie, un calme, un silence monacal. C’est dans cette vie-là, au côté de sa sœur Cyril, que Reynolds Woodcock a décidé...
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le 15 févr. 2018
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Haute-couture et amour fou sont au programme du tout dernier film écrit et réalisé par Paul Thomas Anderson. Est-ce une transposition de sa propre vie ? En tout cas, le film est de toute beauté. Même ceux qui pourraient ne pas aimer les personnages mis en scène ou l'histoire qui les lie auraient mauvaise grâce à le nier.
Beauté des décors (les papiers peints notamment m'ont tapé dans l'oeil), des extérieurs, des costumes, des modèles créés (des coupes, des tissus). Casting hyper soigné, tant pour les trois personnages principaux que pour ceux qui n'ont droit qu'à une ou deux scènes. Et deux éléments qui rehaussent l'ensemble (et qui jouent un rôle majeur dans l'impression qu'on a de visiter pendant plus de deux heures un monde d'une beauté et d'un raffinement extrêmes) : la lumière et la musique. Le film entier baigne dans une lumière douce, exquise, romantique (?) qui embellit tout et qui donne de la beauté aux choses les plus usuelles.
La lumière ravit nos yeux, la musique enchante nos oreilles.
Ces deux éléments font qu'invinciblement le mot "chef d'oeuvre" vient sous la plume du critique amateur (même blasé ou se croyant tel).
Et puis... situer cette histoire d'amour fou (d'amour à mort ?) au sein d'une maison de haute-couture londonienne des fifties, une maison qui n'habille que le gratin, l'extrême haut du panier de la société anglo-saxonne et occidentale (socialites, milliardaires, altesses royales) ne peut que réveiller nos âmes de midinettes et notre insatiable curiosité envers un monde qui n'est pas celui du commun des mortels.
L'histoire met en scène un créateur (Reynolds Woodcock, sorte de Balenciaga anglais), hyper séduisant mais célibataire endurci (le mariage n'étant pas compatible avec son travail : he makes dresses, il fait des robes, des habits). Il dirige, avec l'aide de sa soeur aînée Cyril, sa propre maison de haute-couture. Son quotidien est de dessiner de nouveaux modèles et d'en habiller les femmes du monde. Parti un week-end se ressourcer dans une auberge huppée de la campagne londonienne, il y repère et "drague" une jeune serveuse : Alma... qui, presque immédiatement, va lui servir de mannequin, de modèle, de muse et d'amoureuse.
Au départ, le rapport de forces est nettement en faveur de Reynolds. Mais Alma est une personne sensible et de caractère. Elle pense que son pygmalion est un faux fort, en tout cas avec elle, ou plutôt que c'est dans la partie faible (féminine) de sa nature qu'il puise son inspiration de créateur. Elle lui résiste donc, mine de rien. De fil en aiguille, elle va même aller franchement plus loin.
Bien que finalement conscient des manigances en cuisine de celle qui est maintenant sa femme, Reynolds en devient l'étrange complice (jeux de l'amour et de la mort ?). Et Cyril, la soeur aînée, qui connaît son petit génie de frère mieux qu'il ne se connaît lui-même, finit elle aussi par fermer les yeux devant les agissements quasi pervers de sa désormais belle-soeur, puisque son frère semble y trouver bonheur et inspiration. Le Phantom Thread est donc le lien invisible qui les lie tous les trois (et même tous les quatre, si on ajoute la mère de Reynolds et Cyril qui, décédée, leur reste au coeur).
Daniel Day-Lewis (Reynolds Woodcock), Lesley Manville (sa soeur Cyril) et Vicky Krieps (Alma) sont parfaits dans leurs rôles, éblouissants. Et tous les personnages secondaires seraient également dignes d'être cités.
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le 18 févr. 2018
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