Les fourmis de Saul Bass ne mesurent pas 18 mètres (et n'ont pas de chapeau sur la tête) comme dans Des Monstres attaquent la ville (Thems -1953). Elles n'attaquent pas non plus en meute affamée comme dans Quand la Marabunta gronde (1954). Non, les fourmis de Phase IV sont plutôt du genre cérébral. Elles en ont sous les antennes. Au point de représenter une menace pour les humains en tant qu'espèce dominante. C'est en tout cas la conclusion à laquelle aboutissent les scientifiques après avoir observé le comportement inhabituel des fourmis du désert d'Arizona. Sans prédateur, capable de pactiser avec les autres espèces myrmicéennes, rien ne semble pouvoir arrêter leur expansion.
Deux scientifiques, un entomologiste et un spécialiste du langage animal, se rendent sur place pour analyser la situation. Habillés de combinaisons d’astronautes et retranchés dans une sorte de capsule spatiale, ils sont chargés d'étudier le comportement de ces fourmis du troisième type et d'établir des mesures prophylactiques.
En termes de narration, le film est très intéressant. Les deux scientifiques s'annoncent comme les héros de l'histoire et les fourmis comme leurs (et donc nos) ennemis. Mais le scénario, très subtil à défaut d'être spectaculaire - tend à inverser les points de vue. D'observateurs supérieurs, les deux humains se retrouvent bientôt pris à leur propre piège, non plus sujets, mais objets du dispositif scientifique. Non plus supérieurs en intelligence mais naïfs et dépassés.
De fait, les "personnages" les plus intéressants de Phase IV sont les fourmis elles-mêmes. Superbement photographiés en macro, les insectes ont des allures d'aliens. Les Envahisseurs, mais minuscules. Leur sens de la solidarité, leur capacité d'adaptation aux attaques envisagées par les humains est très bien vue. Par exemple lorsqu'elles s'avèrent capables de construire leurs propres "gratte-ciel" (avec un clin d’œil au monolithe de 2001) ou lorsqu'elles détournent l'insecticide jaune fluo (version revisitée de l'agent orange des GI au Vietnam) utilisé par les deux scientifiques.
Autre piste intéressante que suit Saul Bass, celle du langage. Les fourmis émettent une sorte de bruissement sourd que le linguiste de service s'évertue à décrypter. Objectif : réussir à comprendre leurs intentions.


Le film est en revanche moins inspiré lorsqu'il introduit un personnage féminin par trop artificiel ou lorsqu'il verse -notamment dans le final souhaité par Saul Bass - dans un psychédélisme très seventies.


Pour autant, Phase IV reste un très bon film, passionnant à maints égards. Il vient d'être réédité par Carlotta dans une version restaurée, voire pour les plus dépensiers d'entre vous, dans un fourmidable coffret ultra collector.


8/10

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le 20 juin 2020

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Theloma

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