La suite de trop

Quitte à poursuivre la saga Pirates des Caraïbes après l'excellente trilogie de Gore Verbinski, il aurait été préférable de naviguer sur les Sept Mers en compagnie de nouveaux personnages et laisser en paix les protagonistes des trois précédents films. Pourtant, Disney et Jerry Bruckheimer ne vont pas appliquer la méthode "On reprend les mêmes et on recommence", du moins pas totalement.
La Fontaine de Jouvence reprend plusieurs personnages de la saga (Jack Sparrow, Barbossa, Gibbs..) mais son histoire globale ne va pas essayer de surfer sur le succès du Secret du Coffre Maudit et de sa suite.

Mais après visionnage, on est tenté de dire qu'il aurait presque été mieux que le syndrome de la redite fasse partie du film pour éviter cette nouvelle aventure.
Car en voulant à tout prix s'éloigner des précédentes réalisations de Verbinski, Pirates des Caraïbes 4 finit par trahir la saga à laquelle il appartient.
Le scénario n'est qu'une succession de péripéties inutiles et de sous-intrigues non-finies. La sauce ne prend jamais.

On en vient presque à se sentir insulté quand le Black Pearl apparaît rapetissé et enfermé dans une bouteille après une défaite cuisante contre le Queen's Anne Revenge. Pour un navire dont on nous loue les exploits depuis 3 films, ça parait assez dévalorisant de le voir dans une situation pareille. (Si même le Hollandais Volant n'a pu le vaincre, comment Barbe-Noire pourrait-il y parvenir?). On se pose aussi des questions quant à l'intérêt d'enlever une jambe à Barbossa. Ça ne change pas le personnage et prouve le manque d'idées flagrant de ce nouvel opus. Ça ne sert qu'à amener un (faux?) rebondissement qu'on voit arriver 2 heures à l'avance. (Un pirate avec une jambe de bois tuera Barbe-Noire, je me demande qui ça peut bien être..).

Toutes ces mauvaises idées plombent l'ambiance du film et les nouveaux éléments ne sont pas plus intéressants. La relation entre Jack Sparrow et Angelica est survolée et ne convainc jamais alors qu'elle était à la base prometteuse pour faire avancer le héros de la saga. Les nouvelles créatures rencontrées ne sont guère impressionnantes, les zombies sont mal-exploités et se démarquent à peine des autres pirates, le Queen's Anne Revenge n'est pas très mémorable, Barbe-Noire a un bon look mais n'a jamais l'air d'être l'ennemi redoutable qu'on nous vend (et pourquoi nous faire croire que son équipage ne l'a jamais vu en chair et en os?).

Mais celui qui pâtit le plus de la faiblesse de l'écriture reste Jack Sparrow.
Là où Gore Verbinski nous faisait découvrir de nouvelles facettes du personnage dans les deuxième et troisième films, le pirate n'évolue pas du tout dans ce quatrième volet et n'a plus rien à nous proposer. Ses one-liners ne fonctionnent que rarement et Johnny Depp est devenu son propre cliché, lui qui avait pourtant surpris son public avec son côté humain dans les deux derniers Pirates des Caraïbes.
Quant à Hans Zimmer, il ne fait que recycler bêtement les thèmes de la saga sans rien inventer d'autre.

Rob Marshall a du mal à succéder à Gore Verbinski, le réalisateur n'étant clairement pas à sa place dans un film d'action, l'aventure est plate et molle du genou. Excepté la scène des sirènes plutôt correcte, on se demande où sont passés les 250 millions de budget, la photo est ratée et les décors font le strict minimum. Et quid des batailles navales qui ont fait le grandiose de la trilogie?

L'erreur de Pirates des Caraïbes: La Fontaine de Jouvence c'est d'avoir trop voulu se différencier des autres films de la saga au point de ne plus comprendre ses personnages ou son univers. Et lorsque le film tente de s'en rapprocher, il échoue (le couple remplaçant de Will/Elizabeth est ridicule et le caméo de Keith Richards mal placé).