On les avait vues disparaître durant les années 90, ils n’étaient pourtant pas loin, planqués dans leur tombe, attendant que leur heure viennent à nouveau… Les revenants, les infectés et leurs cousins consanguins sont à présent de retour sur nos écrans suite au succès de l’Armée des Morts et de 28 jours plus tard. Les gens ont faims et veulent de la zombie mania, ça tombe bien les exécutifs hollywoodien sont là pour leur en donner, pas étonnant quant on sait comment la société est devenu ravagé, le monde n’a jamais été aussi proche de basculer dans de nouvelles heures sombres même si pour Robert Rodriguez il ne s’agit pas tellement de projeter la peur ancestrale d’une apocalypse prochaine bien que le récit esquisse une approche un tantinet Romerienne avec un groupe de troufion revenu « glorieux » d’Afghanistan après avoir débarrasser les Etats-Unis de leur pire ennemi Ben Laden. Malheureusement ces soldats sont aussi atteints d’un mal incurable pour lequel il n’y a qu’un seul remède viable : la trépanation par balle. L’auteur fait donc d’une pierre deux coups, en inoculant une dose de morts vivants aux gens tout en concluant le diptyque Grindhouse où le bon ton naît des pires intentions, d’une mise en scène fauché reproduite artificiellement avec un gros budget et quelques têtes d’affiches connus là où le cinéma d’exploitation emploie habituellement d’illustres inconnus. S’il est vrai que le film est généreux dans ses débords gores et sanguinolent en plus de proposer une galerie de personnages outrancier passé au vitriol, Planète Terreur constitue pourtant la parfaite décrépitude d’un genre qui peine parfois à se réinventer depuis plusieurs décennies.
Une gogo danseuse affublé d’un M-16 à la place de sa jambe arrachée, un bidasse décrépit qui sème ses roubignoles en chemin, un hélicoptère qui décapitent des zombies, une veuve noire qui tue à coup de seringues, une résistance qui s’organise autour d’un bar, bref un cocktail réjouissant néanmoins agencé un peu maladroitement comme le sont parfois les péloches de l’époque que le réalisateur cherche volontairement à restituer. On ne pourra pas lui reprocher de faire preuve de générosité là où d’autres productions racoleuses des années 70 ne proposait qu’une tête coupée en guise d’effet choc pour vendre leur concept absolument vide d’épure où on avait réellement le sentiment de se faire enfiler. Mais à trop vouloir mixer les influences, adressés des clins d’oeils à l’univers Tarantinesque, ou à flirter entre premier et second degrés en funambule sur un fil barbelés, Planète Terreur fini par dérouter bien qu’il ne soit pas interdit de le préférer à Boulevard de la Mort. Il y a parfois ce sentiment de trop plein voulant absolument rentrer dans un cahier des charges où l’héritage de ce style de film nécessiterait de verser allègrement dans l’outrance ou d’altérer la qualité pour en apprécier le contenu qui se veut le plus trash possible mais qui ne l’est pas forcément quand bien même il esquisse la tentative de viol avorté d’un militaire campé par son compère Quentin Tarantino.
Cette abondance de bidoche putréfiée et trépanée est probablement aussi ce qui en limite la portée. Etonnamment l’une des meilleures idées du long-métrage consiste à égarer une bobine pour s’épargner une scène de siège assez conventionnel qui va vraisemblablement mal tourner. Cette volonté d’amputer la narration s’avère salutaire puisque le spectateur l’aura sans doute déjà vu 100 fois ailleurs. En dire du mal serait néanmoins bouder notre joie de découvrir enfin un film grindhouse à la mesure de son argument de vente, et sans commune limite. On aura ainsi le plaisir de retrouver un véritable défilé de gueule cassé à l’écran interprété par Tom Savini, Michael Biehn, Bruce Willis, Josh Brolin et même Rose McGowan en égérie du bis, figurant l’image d’une femme blessée pour ne pas dire outragée par plusieurs hommes. Son rôle fait sens à posteriori quant on sait qu’elle fût l’une des principales victimes du producteur Harvey Weinstein. Robert Rodriguez n’a peut-être pas grand-chose à raconter il est vrai mais il le fait avec une telle sincérité qu’il serait mal venu de le lui reprocher. D’une certaine façon la logique du « simple » divertissement régressif est ici poussé à son plus haut degré d’estimation.
Si tu es un zombie abruti par le consumérisme ou bien un crétin congénital obsédé par les réseaux sociaux… Il n’est pas trop tard pour te ramener à la vie. Rends-toi sur L’Écran Barge pour une dégustation gratuite de tripailles et de jambonneaux, du moins si tu es un cinéphile doté de bon goût et surtout d'un cerveau.