Ha ha. Sacré Alain. Si votre route croise ce "plein soleil" par le biais du DVD ou du Bluray, bref du support physique, ne ratez sous aucun prétexte la petite interview de Delon dans les bonus. Non pas pour vous moquer de son embonpoint (à son âge, on a bien le droit finalement), de ses dents gâtées ou d'une sudation affleurante au niveau des aisselles. Non, ce qui est irrésistible, c'est cet art dans l'humilité de la grandeur. Ou de grandiloquence dans la modestie.
Si vous ne le saviez pas, René Clément est le plus grand de tous ceux avec qui Alain a tourné et si l'on songe que c'est ce film qui a lancé la carrière de Delon, on peut au moins accorder à ce dernier la reconnaissance du ventre.
Le glabre qui cache Laforêt
Alors le film commence tout de même assez étrangement, pour ne pas dire catastrophiquement.
Les dialogues sont très empruntés, un poil surjoués, et, je ne sais pas si le fait que ça se passe en Italie y soit pour quelque choses, mais la post synchro est autant désagréable à l’œil qu'à l'oreille.
Toutes les scènes concernant deux hommes (Ronet, qui se fera de nouveau occire par Delon quelques années plus tard, dans la piscine) jeunes et fous dans une Italie charmante de désuétude, sonnent justes comme un piano retrouvé au fond du grenier d'une maison abandonnée depuis la grande guerre dont la toiture n'est qu'un souvenir lointain.
Pour illustrer le doux malaise qui perce lors des premières minutes du métrage, cette curieuse idée qu'on eut les scénaristes de garder les noms anglais du roman de Patricia Highsmith.
Marge de manœuvre
Ainsi Delon se nomme-t-il Tom Ripley (oui, c'est ce même personnage qui vous retrouverez dans le talentueux monsieur du même nom, presque 40 ans plus tard), et la charmante Marie "Marge", ce qui ne manque pas, en 2013, de nous faire penser à une mère de famille au teint jaunâtre arborant une choucroute bleue sur le sommet du crâne.
Mais dès que les trois personnages embarquent sur le bateau, une réelle tension s'installe et un tout autre film démarre. Car à partir de là, les évènements s'enchainent rapidement et de manière suffisamment réalistes pour nous tenir en haleine jusqu'à la fin.
Touristique et classique (Clément sera longtemps blessé d'être pris pour cible des jeunes garnements de la nouvelle vague), apatride et torride, ce policier transalpin saura vous révéler ses discrets mais tenaces charmes pour peu que vous soyez capable de passer le premier quart d'heure maladroit.
Ripley sur un début de carrière
Et puis moi, de savoir qu'Alain s'est pris un vrai coup de baume sur la gueule qui a fait craindre à toute l'équipe qu'il allait finir noyé, ça ajoute un je-ne-sais-quoi qui me rend le film immédiatement plus sympathique.
A moins que ce ne soit ce coup fatal sur la tempe qui n'ait provoqué cette excroissance de la partie du cerveau communément nommée melon.
Delon en large, Delon au large, Alain Melon.