Souvent cité dans les grandes réussites de Imamura avec La ballade de Narayama et L'anguille, Pluie noire a de très fort qu'il ne parle pas vraiment de l'arrivée de la bombe atomique sur Hiroshima, mais sur les conséquences, des années plus tard, sur ses habitants. En particulier Yasuko, une très belle jeune femme qui a reçu de la pluie noire le jour de l'explosion, ce qui est un signe comme quoi elle a été irradiée et qu'elle va en porter les stigmates le reste de son existence. Elle fait fait partie de ce qu'on appelle des hibakusha, à savoir des victimes de la bombe atomique, et que personne veut épouser du fait que c'est une personne de Hiroshima.
D'ailleurs, la bombe atomique en elle-même est un court passage, mais très fort, sur l'impact et les conséquences immédiates avec des enfants qui ont la peau pendante ou des personnes qui se suicident, mais l'essentiel est concentrée sur l'après, comment survivre en tant que victime de la guerre et où les soins sont insuffisants ? Pourtant, Yasuko, interprétée par Yoshiko Tanaka, est un personnage magnifique, qui veut garder la tête haute quoi qu'il arrive, et dont la seule personne qui la comprenne vraiment est cet ancien soldat, Yuichi, joué par Keisuke Ishida, qui a tant été marqué par la guerre qu'il est devenu fou, et refait sans arrêt le geste de balancer des mines en-dessous des voitures, quand bien même ce ne sont en fait que des morceaux de bois. C'est un personnage assez touchant, tout comme Yasuko, car ils sont des victimes indirecte de la guerre, ils sont encore en vie, mais pour combien de temps car la souffrance est toujours là, et restera en eux.
Près de 45 ans après la fin de la guerre, Shohei Imamura a eu le courage de parler de ceux dont on ne parle jamais, avec des scènes d'une grande pudeur, où les quelques instants de joie sont contrebalancés par l'horreur des conséquences de la guerre, même si longtemps après.
Le tout dans un noir et blanc charbonneux et des acteurs irréprochables. Car à ce niveau-là, c'est un devoir de mémoire pour ne jamais oublier. Et il y a certains plans qui resteront gravés dans ma mémoire...