Voilà que s’ouvre une nouvelle décennie, après des sixties mouvementées, pleines de contestations, révoltées par la guerre, cherchant de nouveaux modèles pour la société. C’est dans ce contexte de bouleversements sociaux que s’inscrit Point Limite Zéro, qui n’est pas juste un film de course-poursuite, mais bien un symbole de cette mouvance généralisée annonçant un véritable changement d’époque.


Cet homme, qui s’est mis en tête la folle idée de parcourir 2000 km en 15 heures seulement, est d’abord une énigme dont le passé reste inconnu, pour devenir peu à peu un véritable symbole. Au fil de cette poursuite infernale où les moteurs vrombissent, nous découvrons de vastes paysages et divers individus venant ponctuer cette quête effrénée et ô combien périlleuse. Le minimalisme est un des éléments-clé du film, tourné en très peu de temps pour un budget relativement dérisoire (28 jours de tournage et 1,4 million de dollars de budget), mais le message qu’il véhicule n’en demeure pas moins fort et représentatif d’une transformation de la société sous fond de contre-culture et de contestation.


Le parallèle évident s’établit avec un des autres grands films de cette époque et de cette mouvance : Easy Rider. L’équivalent sur moto proposait un hymne à la liberté, une exploration des grands espaces et la rencontre avec des rejetés du système ayant décidé de vivre en autarcie. Point Limite Zéro reprend à peu près les mêmes principes, la voiture et sa cadence folle devenant des représentations directes de l’affranchissement des règles, de l’audace et de la soif de liberté. Car Kowalski, le chauffeur, est bien de ceux qui ont été trahis par le système et les lois et pour lequel, désormais, cette simple mission de convoi se mue en quête d’un ultime envol pour parvenir à finalement s’élever et dépasser le monde qui l’entoure.


Accompagné au cours de son trajet par la voix du DJ fantasque « Super Soul », le conducteur balaie toute la société américaine, de la plus conservatrice à la plus libertaire, pour constituer un tableau vivant de ce qui constitue un choc des cultures et des mœurs à l’orée d’une nouvelle décennie qui s’annonce une fois de plus contestataire et folle. Malgré cette irrésistible quête de défiance, la brutalité de certaines vieilles traditions viennent freiner les héros de ce mouvement, entre racisme et homophobie, malgré une libération généralisée des mœurs, certains maux persistent et leur ombre plane sur ce vaste tableau multicolore. Finalement, cette route se montre comme une libération et s’achève sur un dernier pied de nez à la fois résigné et apaisé.


Point Limite Zéro est un modèle de road movie, aux moyens très modestes, lui permettant d’être simple sur la forme, mais d’être bien plus développé sur le fond. Indissociable de son contexte, il en est même un des éléments-clé et un de ses symboles, à la limite de l’allégorie pour offrir un témoignage à deux cents à l’heure d’une époque durant laquelle la société se cherchait. Ancré dans son époque, il n’en demeure pas moins d’actualité sur certains points, et on comprend pourquoi ce film qui a inspiré Quentin Tarantino dans sa carrière et sa cinéphilie, est considéré comme culte aujourd’hui.

JKDZ29
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le 26 juin 2017

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