Take me DOWN to the Paradise City
Los Angeles, son soleil, ses embouteillages, ses criminels et ses flics. Jim et Richard forment un duo d'inséparables flics à grosses burnes. La preuve, ils viennent juste de sauver une délégation officielle d'un kamikaze islamiste (Allah akbarre-toi, qu'ils lui ont dit). Mais sauver le monde c'est dur et Jim veut partir à la retraite mais comme la retraite c'est chiant, il préfère se faire tuer par un faussaire notoire, Rick Masters (Willem Dafoe, tout jeune mais déjà flippant), à 3 jours de la quille. Il n'en faut pas plus pour mettre Richard (William Petersen, 20 kilos avant Les Experts) en pétard, il jure de tout faire pour mettre Masters sous les verrous.
Police fédérale Los Angeles commence comme un bête film d'action avec son méchant bien méchant, son héros revanchard et son esthétique trop années 80 pour être honnête. Musique pop fm assez insupportable (du sous-Giorgio Moroder dégénéré), générique immonde en rose et vert fluo, héros en santiag-jean slim-moule-cul et chemise ouverte sur les biscotos, enjeux qui semblent cousus de fil blanc... les premières minutes du film font peur.
Mais assez vite la sécheresse du traitement nous fait comprendre qu'on n'est pas face à un film d'action "à la con" comme les années 80 en regorge. La violence est assez crue (boum, headshot) mais pas envahissante et encore moins glorifiée. L'aspect Buddy-movie cool est évacué au bout de 10 minutes. Le sexe est montré sans détour au lieu de la pudibonderie habituelle du genre. Les personnages s'éloignent de la platitude attendue à la suite de leur caractérisation. Les clichés tombent les uns après les autres et la spirale infernale s'enclenche, inexorablement.
Ca ne veut pas dire que l'action est absente pour autant puisqu'il y a quelques séquences musclés bien emballées, dont une course-poursuite tout à fait excitante à travers les rues de la cité des anges.
Sous le vernis pop-clip-cheap-eignthies c'est bel et bien le William Friedkin de French Connection qu'on retrouve et autant dire que ça fait plaisir puisque la mise en scène du bonhomme est d'une solidité à toute épreuve.
Petit à petit le banal récit du hard-boiled cop qui casse la gueule au psychopathe de service dérive vers un polar noir, sale, dur.
Le scénario nous dépeint des personnages ayant leurs limites et leurs faiblesses, des personnages qui prennent des décisions difficiles et parfois mauvaises.
Richard, notre brave héros du début, dévoile au fur et à mesure des facettes moins reluisantes de sa personnalité, et de son travail, sans jamais tomber dans la facilité du pourri absolu. Il prend de plus en plus d'épaisseur et d'humanité et on arrive vite à oublier son mauvais goût vestimentaire. Autour de lui gravitent quelques seconds rôles tout à fait intéressants et campés avec talent : John Turturro, Dean Stockwell ou John Pankow complètent donc un casting qui a sacrement de la gueule.
On regrettera juste que le personnage de Ruth ne soit pas plus développé, tant elle avait un potentiel fou à offrir dans cette sombre et triste histoire.
C'est à ce moment-là qu'on se dit que le titre original, "To live and Die in L.A.", rend bien plus justice au contenu âpre du film que la pâle traduction française. Les rebondissements nous entraînent dans un récit implacable qui prend les atours d'une tragédie policière. Un parcours long et douloureux jusqu'à un final sans concession, en forme de coup de poing dans les dents.
Il est amusant de noter à quel point To Live and Die and L.A. a servi de matrice au film de Richard Donner, L'Arme Fatale, qui sortira 2 ans plus tard. Il y a même la ligne de dialogue "I'm getting too old for this shit" qui sert de signature aux 4 aventures de Riggs et Murtaugh.
Bien moins connu que son illustre descendant, le film de William Friedkin mérite d'être (re)découvert.
Police Fédérale Los Angeles est un polar rugueux et savoureux qui s'inscrit sans peine dans les meilleures oeuvres de son auteur... et quand on pense que le bonhomme a réalisé L'exorciste, Cruising, Le Convoi de la peur ou French Connection ça en dit long sur les immenses qualités de ce film.