Il faut le dire d’emblée : cette Pop rédemption initiée par Martin Le Gall n’est ni un éloge sérieux au black metal, ni à la pop mais un mix plaisant entre la rencontre improbable des deux par la contingence des évènements. Cette fusion s’avère finalement ici être la bonne recette du succès pour ce groupe pas franchement plébiscité. Le film est donc un festival musical hybride, montrant qu’au fond peu importe le style du moment qu’il y a le feeling. Au fond, on le sait et cela nous est rappelé dans le film : « la musique est un langage universel ».
Ainsi la musique comme souvent s’avère être pour tous le grand stimulant : ni plus ni moins que l’essence de la vie comme lieu d’énergie et de cohésion. « Une vie sans musique ne vaut pas la peine d’être vécue » disait Nietzsche. Nos black métalleux , bien qu’aussi éloignés que possible de l’ascète de Sils-Maria, s’accorderaient néanmoins sans doute avec lui sur ce point. C’est l’histoire de quatre garçons dans un van mais pas franchement dans le vent : loosers, n’ayant jamais réussi à vivre de leur art, ils en sont réduits à galérer chacun de son côté dans leur vie respective et leurs soucis personnels mais ont pour tradition de reformer le groupe chaque été et partir sur les routes, seulement la lassitude s’est installée et le groupe est proche de l’implosion. Un seul des quatre- le chanteur incarné par le charismatique Julien Doré- y croit encore et espère faire un carton au Hellfest à venir à Clisson, dans l’Ouest de la France. Pour ce faire, il entraîne donc ses trois amis de toujours sur la route et n’hésite pas à casser son CODEVI pour louer une salle et leur obtenir une date de préparation.
Hélàs…les choses ne tournent pas comme prévu et le sympathique groupe se retrouve mêlé, bien malgré lui, à un homicide. Une policière très consciencieuse (Audrey Fleurot) se lance alors sur leurs traces avec son insupportable collègue (Alexandre Astier) et une aventure haute en couleur, en rencontre et en improvisation musicale forcée qui donnera lieu à une conversion de la médiocrité en génie commence alors pour ce petit monde.
Le film est ponctué de citations espiègles de titans de la musique tel que Georges Harrison ou Sergent Pepper tout en étant simultanément accompagné de clin d’œil complice à l’histoire de la musique par l’image : à commencer par la fameuse traversée de route des Beatles, reprise de nombreuses fois dans le film. Dans le processus humoristique déployé, les clichés et les contrastes sont en effet utilisés à outrance, tant pour le métal que pour la pop, et fonctionnent plutôt bien comme comique de situation tout au long de l’intrigue. Le paroxysme de ce procédé étant le personnage fictif de Dozzy Cooper : star monumentale du Hellfest, un splendide monument du black métal et l’Idole de la fille de notre policière qui donnera malgré lui l’autorisation au groupe de faire sa première partie pour récupérer son crucifix préféré volé jadis par les quatre acolytes.
La réconciliation finale a lieu autant entre les styles musicaux opposées, qu’entre les différents personnages rencontrés au cours de cette épopée marque une fin naturellement attendue. Remarquons que paradoxalement et malicieusement, c’est par cette musique profane que la paix arrive. Comme pour rappeler que tout black rockeur a au fond de lui un petit« All you need is love », le nom du groupe hippie dont ils usurpent honteusement l’identité au cours de leur dérobade, mais aussi un côté mystique (Julien Doré chantant les larmes aux yeux au cours d’une messe dans une petite chapelle où il échoue). Un générique sympathiquement kitsh vient clore parfaitement ce petit film léger narrant une aventure entre amis qui rappelle beaucoup de par son côté road trip le Little Miss Sunshine de Jonathan Dayton ou encore La part des anges de Ken Loach dans son déroulement, sans prétention ni longueurs. Un mix gentiment téméraire qui donne lieu à une rédemption multiple et plutôt réussi.