Quand les hommes étaient des hommes et les femmes portaient des jupes
Le paradoxe serait, pour populaire, de faire un flop au box-office. Consciente de ce danger, la production s’est lancée dans l’une des plus grandes campagnes d’affiches de ce trimestre. On nous y a promis Romain Duris, Déborah François et une comédie toute pétillante.
Pour son premier film, Régis Roinsard recule dans la fin des années 50, en plein cachet Mad Men, quand « les hommes étaient des hommes et que les femmes portaient des jupes ». Piégée dans un village de Basse Normandie, Rose Pamphyle se rêve une femme moderne, parcourant le globe pour de grands hommes. Elle atterrit comme secrétaire dans le cabinet de Louis Echard, un assureur caustique mais bien coiffé. Si elle est mauvaise employée, elle martèle diablement vite le clavier - et se trouve embarquée dans des compétitions de dactylographie.
Ce film se veut volontairement ringard, protégé par le voile du vintage et des couleurs Bonne France. Le ton bon enfant, « c’était mieux avant », survole un petit monde de poupées et s’autorise, même, des envolées visionnaires « pour l’époque » («Bientôt tous les jeunes auront des claviers »). Cette légèreté narrative permet un certain recul - probablement nécessaire pour l’apprécier dans son ensemble. Car la nostalgie du milieu de siècle s’accompagne d’une certaine satire, bien que polie et souriante. Sous cet aspect, il faut voir, dans le jeu d’acteurs, un second degré très assumé. Romain Duris offre un Donald Draper à la française, qui appelle les femmes « mon chou » et fricote avec les américains. La Peggy Olson sera Déborah François, même frange, même démarche, même étincelle dans le regard - elle nous avait d’ailleurs habitués à des rôles plus durs. Les dialogues entassent les clichés du genre (« du genre de l’époque ») et sont récités, parfois, selon une certaine fausseté qui, loin de dénoter, s’intègre parfaitement dans l’esprit du film, dans son essence made in 58 - où diction primait sur justesse. Les « Je t’aime ! » sont de grands cris du coeur et les baisers sont passionnés. On notera, aussi, la présence de Bérénice Béjo, un peu effacée une fois parlante (le retour j’imagine, de toute l’aura de The Artist).
Populaire est-il drôle ? Je vais vous dire oui. Il met, même, d’excellente humeur. L’humour reste convenu et tasse de thé, mais la sauce prend parce que Déborah est mignonne et que l’univers est coloré. La bande originale, à ce titre, est une pure réussite car fraîche et entrainante. Pour peu, par ce jeu de couleurs, de décors symétriques, et de sourires figés, l’on se croirait dans un dessin animé, peut-être même un Disney - l’héroïne ne serait-elle pas une Cendrillon vaguement modernisée ? (Quand on y pense, la production Disney date, elle aussi, de 1950. Phénomène d’une décennie ?)
Au final, Populaire est un film d’une incroyable fraîcheur. Son histoire n’est pas grandiose. Son message n’est pas subtil. Mais il touche les commissures là où il faut et tient bon le rythme. Avant les Fêtes de Fin d’Année, le ton est joliment donné.