Portier de nuit par Johannes Roger
En général, les films qui traitent du sado masochisme me font rire, celui-ci échappe à cette règle. Le contexte historique et l’ambiguïté morale ne prêtant pas vraiment à la rigolade. La mise en scène sophistiquée et élégante de Cavani rappelle les derniers travaux de Visconti, « les damnés » notamment, dont la réalisatrice emprunte deux des interprètes. Pour ce qui est du fond, elle met tout d’abord le doigt sur un des problèmes de l’époque, l’assimilation du nazisme par le monde d’après guerre. Passé les procès d’épuration, les derniers criminels de guerre essayant de se faire oublier, pour mieux insinuer leurs idées dans la société. Là dessus le propos de la réalisatrice est sans ambiguïté, elle montre clairement le danger de la renaissance du fascisme et du nazisme. Il en va différemment du couple principal et de leur histoire d’amour tordue. Moralement, cette partie se situe au-delà du bien et du mal, comme si nos deux amants ne parvenaient plus à ressentir des émotions aussi fortes, fussent elles négatives, que celles vécues durant la guerre. Condamnés à répéter ad vitam leurs rapports étranges, incapables de vivre dans un monde en paix. La sympathie que l’on finit par éprouver pour eux, est en grande partie due aux interprètes et à l’humanité qu’ils donnent à leurs personnages. Ils ne sont en aucun cas représentatifs, même symboliquement, du drame de la Shoah, mais Cavani pose à travers eux des questions qui vont bien au-delà de nos représentations morales, d'où le malaise que l’on peut ressentir devant cette histoire.