Poser est un film dramatique remarquable.
Ce film raconte la timide percée d'une jeune podcaster dans l'univers underground de sa ville. La caméra suit sa plongée dans un univers bienveillant de musiciens à la recherche de leur voie. L'héroïne, solitaire, Lennon (Sylvie Mix) est timide et s'insinue dans ce monde avec peine, passant son temps libre à courir après les évènements et les protagonistes de sa ville quand elle ne fait pas la plonge dans un restaurant.
Elle enregistre les témoignages de membres de groupes au fil de ses rencontres, des sessions et notes ses réflexions dans un carnet qu’elle porte avec elle tout au long de ses recherches. Mais elle reste tout le temps en retrait, jamais elle ne se lâche, elle participe qu’avec peine aux évènements des membres de la faune qu’elle explore, toujours séparée des autres par ses attributs electroniques.
Pourtant, une jeune chanteuse solaire, Bobbi Kitten, (qui joue son propre rôle), sympathise avec Lennon et l’introduit dans son univers tout en se désolant avec ses amis de son extrême réserve. Cette amitié laisse penser que tout va aller pour le mieux entre elles.
Mais ce qui est stupéfiant dans ce film, c’est sa forme : L’image est tranquille, parfaitement mise en scène et d’une précision chirurgicale (c’est pas un film de guerre!). Il y a une sobriété de la narration qui interpelle tout amoureux de l’image. Là, pas d’image qui bouge tout le temps pour figurer l’énergie de la jeunesse, on est juste coincé dans la vision frustrée de l’héroïne. Comme elle, nous assistons à son regard distant sur les évènements de sa vie. Les plans sont courts mais pas hachés. Disons plutôt que l’ensemble gère un rythme qui s’accorde à l’état d’esprit de Lennon.
Les réalisateurs s’appellent Noah Dixon et Ori Segev. A la lecture du générique de fin on s’aperçoit que Ori Segey a ajoutré des dizaines de touches dans la réalisation. Comme si le premier est arrivé avec sa vision et son scénario strict et que le second courrait dans tous les sens pour ajouter sa pâte dans tous les domaines : mise en son, colorisation, et surtout le montage, lui aussi d’une précision remarquable. Ce gars sait écrire avec les images, et il le fait bien.
Voilà. Ce film est un ovni. Il n’est pas possible de l’oublier. Il laisse une trace unique dans le cinéma créatif underground. Ce serait un péché que de passer à côté.